Page:Dubois - Le Pantcha-Tantra ou les cinq ruses.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
50
LE BRAHME, LE CROCODILE, L’ARBRE,

chaleurs, il se voyait alors exposé à des souffrances cruelles. Astica, touché de compassion, mit le crocodile dans son sac de voyage, le chargea sur ses épaules, et continua sa route.

Arrivé au bord du Gange, le brahme ouvrit son sac, et montrant les eaux de ce fleuve au crocodile, lui dit qu’il pouvait y entrer ; mais ce dernier représenta à son bienfaiteur que, se sentant très-fatigué de la route qu’ils avaient faite ensemble exposés durant plusieurs jours aux ardeurs du soleil, il lui serait trop pénible de se transporter seul dans le fleuve, et il le pria de le conduire jusqu’à une certaine distance. Le brahme, ne soupçonnant aucun mauvais dessein dans le crocodile, consent à sa demande, et le dépose dans l’eau à une certaine profondeur. Comme il se retirait, le crocodile le saisit par la jambe avec ses dents ; il cherchait à l’entraîner au fond de l’eau. Saisi de frayeur et indigné d’une pareille trahison, le brahme se débat : Perfide, s’écrie-t-il, scélérat ! est-ce donc ainsi que tu rends le mal pour le bien ? Est-ce donc là la vertu que tu pratiques ? Est-ce là la reconnaissance que j’avais droit d’attendre de toi après t’avoir rendu service ?

Que veux-tu dire, repart le crocodile, par tes mots vertu, reconnaissance ? La vertu et la