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DEVENU MINISTRE.

laisse impunément commettre en son nom les injustices les plus révoltantes dans tout son royaume ? Sous quel règne une malheureuse veuve sans ressource s’est-elle jamais vue réduite par l’insatiable cupidité de ministres avides, au cruel désespoir de ne pouvoir pas même rendre les derniers devoirs à un fils chéri ?

Le roi avait écouté avec la plus grande attention tout ce que dictait à cette pauvre femme l’excès d’une juste douleur. De quel étonnement ne fut-il pas saisi lorsque ces dernières paroles vinrent frapper son oreille ! Tout ce qu’il avait entendu était pour lui une énigme inintelligible. Il ne pouvait deviner quel homme la veuve prétendait désigner sous le nom de l’homme au gros bâton, ni ce que signifiaient les cinq fanons d’or levés sur les cadavres ; encore moins pouvait-il entendre de sang froid les plaintes amères que, dans son désespoir, cette malheureuse mère venait d’exhaler contre le prince et contre la tyrannie de son gouvernement : jusqu’alors il avait toujours cru, comme ses perfides ministres s’efforçaient de le lui persuader, que ses peuples vivaient heureux et contens. Avant de se retirer, il donna ordre à deux de ses gardes de remarquer la maison, et de lui amener cette femme au palais aussitôt qu’il ferait jour.