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Ah ! dans l’état de corruption où sont arrivés aujourd’hui les hommes, leur Dieu, c’est l’argent ; leur gourou, c’est l’argent ; leur caste, leur parenté, c’est l’argent et encore l’argent ! Un homme sans argent est un homme mort au monde. Ce mot l’argent a un pouvoir si merveilleux sur l’esprit des hommes de nos jours, que si on le prononçait tout haut à l’oreille d’un mort, il reprendrait vie, je crois, et se lèverait sur-le-champ pour dire : J’en veux aussi.

Vous avez bien raison, interrompit le gourou, et je reconnais par ma triste expérience combien est vrai tout ce que vous me dites là : l’argent a tant d’empire sur les hommes, que si on en mettait sur un tas d’ordures les plus sales et les plus puantes, la plupart d’entre eux ne rougiraient pas de le ramasser même avec la langue, s’il le fallait.

Et qui plus est, repartit le voyageur, c’est qu’en le faisant, ils n’auraient pas honte de soutenir que cet argent ramassé sur un tas d’ordures sent bon ; car, je vous le répète, dans les temps où nous vivons, les hommes ne regardent pas aux moyens : pourvu que l’argent vienne, cela leur suffit ; qu’il vienne par des voies honnêtes ou déshonnêtes, justes ou injustes, tout leur est égal.