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LE TIGRE, LES RENARDS, ETC.

rendre le goût plus piquant. Lorsque tout fut préparé, il goûla ces divers mets, qui lui parurent excellens. Fier d’avoir si bien réussi dans sa cuisine, il vient trouver le tigre, et, la joie peinte sur toute sa contenance, il lui présente le repas qu’il a préparé avec tant de soin. Dès que l’odeur forte du poivre et des autres épices dont les mets étaient abondamment assaisonnés parvint à l’odorat du tigre, celui-ci fut obligé de se boucher le nez ; cette odeur, bien différente de celle des cadavres dont il avait coutume de se repaître, lui parut insupportable, et il commença dès-lors à croire fermement que ce brahme avait en effet formé le dessein de l’empoisonner, comme les renards l’en avaient averti.

Cependant, avant de se livrer aux impulsions de son indignation, le tigre dit au brahme de poser par terre les divers mets qu’il avait apportés, et commanda ensuite aux renards d’y goûter : ces derniers ne firent qu’apposer la langue dessus, et tournant la tête de côté, ils exprimèrent leur dégoût par d’affreuses grimaces. Pour mieux s’assurer du fait, le tigre voulut y goûter lui-même, et le goût de ces mets lui parut en effet si détestable, que ne doutant plus que ce ne fût vraiment du poison, il entra aussitôt dans un si