Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/88

Cette page n’a pas encore été corrigée

d'une plus grande recherche, on consultait ceux qui arrivaient nouvellement du fond de leur pays. On proposait des récompenses à ceux qui déterraient quelques vieux mots, quelques anciennes expressions propres à être placées dans le trésor. On affectait ensuite de s'en servir pour les apprendre à ceux qui les avaient oubliées, ou plutôt qui n'en avaient jamais eu connaissance. Lorsque tous ces mots furent rassemblés, et qu'on crut qu'il n'y en manquait que très peu qui pourraient se mettre dans un supplément, on les distribua par classes. La première classe parle du ciel ; la seconde du temps ; la troisième de la terre ; la quatrième de l'empereur, du gouvernement des mandarins, des cérémonies, des coutumes, de la musique, des livres, de la guerre, de la chasse, de l'homme, des terres, des soies, des toiles, des habits, des instruments, du travail, des ouvriers, des barques, du boire, du manger, des grains, des herbes, des oiseaux, des animaux domestiques et sauvages, des poissons, des vers, etc. Chacune de ces classes est divisée en chapitres et en articles. Tous les mots ainsi rangés et écrits en lettres majuscules, on met sous chacun en plus petits caractères, la définition, l'explication, et l'usage du mot. Les explications sont nettes, élégantes, d'un style aisé, et c'est en les imitant qu'on apprend à bien écrire. Comme ce livre est écrit en langue et en caractères tartares, il n’est d'aucune utilité pour les commençants, et ne peut servir qu'à ceux qui sachant déjà la langue, veulent s'y perfectionner, ou composer quelque ouvrage. Le dessein principal a été d'avoir une espèce d'assortiment de toute la langue, de sorte qu'elle ne puisse périr, tandis que le dictionnaire subsistera. On laisse aux descendants le soin d'y faire des additions, s'ils viennent à découvrir quelque chose nouvelle qui n'ait point de nom. Ce qu'il y a de singulier dans la langue tartare, comparée avec la langue française, c’est que les Tartares ont des verbes différents autant de fois que les substantifs régis par le verbe, sont différents entre eux : par exemple, si l'on se sert du verbe faire, il faut le changer presque autant de fois que change le substantif qui suit ce verbe ; nous disons, faire une maison, faire un ouvrage, des vers ; faire un tableau, une statue ; faire un personnage, faire le modeste, faire croire, etc. Cela est commode et charge moins la mémoire, mais c'est ce que les Tartares ne peuvent souffrir. Si le même verbe leur échappe dans le discours familier, on le pardonne : mais on ne le passe jamais dans la composition, ni même dans les écritures ordinaires. Le retour du même mot dans deux lignes voisines, ne leur est pas plus supportable : il forme par rapport à eux une monotonie qui leur choque l'oreille. C’est pour cette raison qu'ils se mettent à rire, lorsqu'on leur lit un de nos livres, parce qu'on entend très souvent, que, qu'ils, qu’eux, quand, quelquefois, etc. La fréquente répétition de ces pronoms leur déplaît infiniment. On a beau leur dire que c’est le génie de notre langue, ils ne