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Depuis que la famille tartare maintenant régnante, occupe le trône de la Chine, on parle à la cour la langue des Tartares Mantcheoux, de même que la chinoise ; deux présidents, l'un tartare et l'autre chinois sont à la tête de chaque cour souveraine, et tous les actes publics émanés de ces premiers tribunaux, et du Conseil suprême de l'empereur, se dressent en l'une et l'autre langue. Cependant cette langue, quoique sans comparaison plus aisée à apprendre que la langue chinoise, qui est la dominante dans tout l'empire, courrait risque d'être tout à fait abolie, sans les précautions que prirent les Tartares après la conquête de la Chine. Jaloux de conserver leur langue qu'ils mettaient beaucoup au-dessus de celle des Chinois, ils virent bien qu'elle s'appauvrirait insensiblement, que même elle se perdrait tout à fait, plutôt par l'oubli des termes, que par le mélange de la langue chinoise avec la leur, car ces deux langues ne peuvent nullement s'allier ensemble. Les vieux Tartares mouraient peu à peu à la Chine, et leurs enfants apprenaient plus aisément la langue du pays conquis, que celle de leurs pères, parce que les mères et les domestiques étaient presque tous chinois. Pour parer à cet inconvénient, sous le premier empereur Chun tchi qui ne régna que dix-sept ans, on commença à traduire les livres classiques de la Chine, et à faire des dictionnaires de mots, rangés selon l'ordre alphabétique : mais comme les explications et les caractères étaient en chinois, et que la langue chinoise ne pouvait rendre les sons ni les mots de la langue tartare, ce travail fut assez inutile. C’est pour cette raison que l'empereur Cang hi dès le commencement de son règne, érigea un tribunal de tout ce qu'il y avait à Peking de plus habiles gens dans les deux langues tartare et chinoise. Il fit travailler les uns à la version de l'histoire et des livres classiques qui n'étaient pas achevés ; les autres aux traductions des pièces d'éloquence ; et le plus grand nombre à composer un trésor de la langue tartare. Cet ouvrage s'exécuta avec une diligence extraordinaire. S'il survenait quelque doute, on interrogeait les vieillards des huit bannières tartares : et s'il était nécessaire