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à leur personne et à leur religion l'admiration de toute la cour, où ils s'étaient rendus très puissants. Leur pouvoir a subsisté à la Chine tout le temps que la famille impériale des Yuen a occupé le trône. On voit encore à Peking des monuments érigés en faveur des lamas de ce temps-là ; mais les Chinois étant devenus les maîtres sous Hong vou, fondateur de la dynastie Ming, les lamas furent chassés avec le reste des Tartares. Leur crédit se rétablit sous la famille régnante, qui est des Tartares Mantcheoux. Quoique la nation n'ait jamais eu de lama, aussitôt qu'elle entreprit la conquête de la Tartarie voisine, soit intérêt, soit politique, elle commença de leur être favorable. Le Grand lama même, tout fier qu'il est, n'oublia rien pour gagner Chun tchi, lorsqu'il le vit maître de l'empire. Il en vint jusqu'à quitter Lasa, lieu de sa résidence, et se rendit à Peking pour féliciter l'empereur, et répandre ses plus abondantes bénédictions sur la nouvelle famille Tai tsing. L'impératrice fit peu après bâtir une magnifique pagode pour les lamas. Cet exemple fut suivi de plusieurs, tant princes que princesses, et autres gens riches ; et il n'est pas surprenant que pour remplir tant de pagodes ils se soient si fort multipliés à la Chine ; il faut même qu'ils y soient riches, car la plupart des vrais lamas paraissent vêtus de beau satin jaune et rouge, et des peaux les plus rares ; ils montent de bons chevaux, et sont suivis d'un nombre de valets plus ou moins grand, suivant le degré de leur mandarinat ; car l'empereur leur permet de porter le coussin, et les autres marques d'honneur attachées à la qualité de mandarin. Pour ce qui est des lamas du Thibet, ils ne sont habillés la plupart que d'une étoffe de laine, qui ressemble assez à notre frise, mais plus étroite et moins serrée. On la nomme à la Chine pou lou, et l'on s'en sert pour couvrir les selles, parce qu'elle est de durée et bien teinte. Le lama géographe a rapporté, que quand il vit le Grand lama à Lasa, il avait un habit rouge de cette étoffe, et le chapeau jaune doré. Outre le chapeau, les lamas ont plusieurs espèces de bonnets, dont ils se servent, suivant le rang où ils sont parvenus ; car il y a parmi eux différents degrés d'honneur, auxquels on les élève à proportion de leurs services. Parmi ces bonnets, celui qui frappe le plus les yeux des Européens, ressemble en quelque sorte aux mitres de nos évêques ; ils le portent à cheval de même qu'à pied, mais la fente de cette espèce de mitre leur répond au milieu du front. On trouve chez ces peuples d'assez bons médecins ; on en voit aussi quelques-uns qui savent supputer le mouvement des astres et prédire les éclipses. Mais, ce qui est rare parmi les lamas, qui sont les docteurs chargés d'instruire les peuples, c'est d'entendre leurs anciens livres ; la plupart ne savent pas même les lire ; c'est ce que quelques-uns des plus considérables d'entr'eux ont avoué de bonne foi. L'ignorance où ils sont,