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à moins qu'ils n'aient demeuré un certain temps dans l'école du Grand lama. Mais ils n'ont pas été plus tôt faits houtouktous, qu'ils vivent dans l'honneur et dans l'opulence, par la foule des adorateurs qui viennent à eux de toutes les contrées voisines, et par la quantité des présents qu'on leur fait. Parmi ces Tartares lamas qui habitent le Thibet, les plus riches et les plus considérables sont ceux que les Chinois nomment Mong fan ; ils possèdent de grandes terres au nord de Li kiang tou fou, entre les belles rivières de Kin cha kiang et de Vou leang ho. Ce fut Ousanguei, que les Tartares Mantcheoux firent roi d'Yun nan, lorsqu'ils s'emparèrent de la Chine, qui leur céda ces terres pour les mettre dans son parti, et par leur moyen s'attacher tous les lamas du Thibet. La langue qu'on parle au Thibet, est entièrement différente de celle des Tartares, soit Mongous, soit Mantcheoux ; elle est presque la même que celle des peuples nommés Si fan, et elle n'en diffère qu'en certains mots et en quelques prononciations. Le pays des Si fan confine avec trois provinces de la Chine ; savoir celle de Chen si, celle de Se tchuen et celle d'Yun nan, depuis le trente-cinquième degré de latitude au nord, jusqu'au trentième, et s'étend à l'occident jusqu'à la rivière d'Yalong kiang, ainsi que l'appellent les Chinois. Cette conformité de langage des Si fan avec les Thibétains, fait que, nonobstant la diversité qui se trouve dans la forme du gouvernement et dans la manière de vivre et de se vêtir, les Chinois comprennent sous le nom de Si fan, non seulement ces peuples, leurs voisins, mais encore tous ceux du Thibet, et quelquefois même, comme on le voit dans leurs Livres, toutes les nations occidentales à leur empire. C'est par cette raison que la langue et l'écriture du Thibet est fort souvent nommée par les Chinois, langue de Si fan (Si fan hoa), et écriture des Si fan (Si fan tse). On nomme aussi leur écriture, caractères ou écriture du tangouth : expression commune aux Tartares, qui par tangouth gergen entendent les caractères du Thibet. Il paraît néanmoins que ce nom de Tangouth qu'on trouve aussi sur nos cartes d'Asie, est un nom commun à tous les pays, depuis les terres des Tartares Kokonor, contiguës aux terres de Si ning, ville de la province de Chen si, allant de là sud-ouest, jusqu'à la source du Gange ; et qu'ainsi il comprend non seulement le Thibet, mais encore les larges plaines et tous les déserts qui sont à son nord et à son ouest, qu'on trouve dans la carte bordés par des chaînes de montagnes. On voit là encore maintenant des Tartares avec leurs troupeaux et leurs tentes. Ils relèvent aujourd'hui du roi des Eluths qu'on nomme Tse vang raptan. Il se peut faire aussi (car la Tartarie est le pays des invasions et des révolutions subites), il se peut faire qu'autrefois ces Tartares étaient en plus grand nombre, qu'ils parlaient la langue du Thibet, et qu'ils donnaient la loi à leurs voisins ; du moins l'on voit dans les relations des voyages des pères d'Orville et Greber, qu'en l'année 1661 il y avait parmi ces Tartares une forme de gouvernement monarchique, un roi, une cour, des officiers,