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à ce que les soldats chinois enfoncèrent ceux qui leur étaient opposés, vers l'extrémité de la montagne du côté de la rivière. On ne les poursuivit pas loin, parce que la nuit approchait, et qu'ils se retirèrent dans les bois et les bocages qui sont le long de la rivière, où était leur bagage ; mais ils furent si épouvantés, tant de la fermeté avec laquelle ils avaient été reçus et repoussés, que du grand nombre de troupes qu'ils virent, ne pensant pas qu'il y en eut seulement le tiers, qu'ils s'enfuirent en désordre toute la nuit, et sauvèrent ce qu'ils purent de leurs familles et de leur bagage. Leur roi même, dont la femme avait été tuée d'un coup de canon, fut le premier à s'enfuir avec le reste de sa famille, et avec très peu de suite. On trouva dans son camp des femmes, des enfants, et des blessés en assez petit nombre, avec quelques bestiaux qu'ils n'avaient pu emmener ; mais les jours suivants, les fuyards ne sachant ni ce qu'était devenu leur roi, ni où aller, se vinrent rendre par troupes. Si les soldats de l'empereur avaient eu de bons chevaux pour les poursuivre, il y en aurait eu peu qui se fussent échappés. Le lieu où l'armée de l'empereur était rangée en bataille, s'appelle Tchao mou. Quand nous eûmes considéré à loisir ce champ de bataille, nous descendîmes dans la plaine qui est à l'ouest de ces montagnes, laquelle est arrosée de plusieurs petits ruisseaux, qui vont se jeter dans la rivière de Toula. Cette rivière coule au pied des montagnes qui bornent la plaine au nord, elles sont fort hautes et couvertes de sapins. Vers le milieu de la plaine nous vîmes les ruines de la pagode qui y avait été bâtie par le Grand lama des Kalkas, Tchempe zun tamba houtouktou. Il avait choisi cet endroit-là pour sa demeure. Il campait ordinairement le long de la rivière, proche de ces agréables bocages dont j'ai parlé. Cette pagode était, dit-on, fort magnifique. Il avait fait venir exprès des ouvriers de la Chine pour la construire. On y voyait encore des tuiles et des briques vernissées de jaune, comme celles qui couvrent les toits du palais de l'empereur à Peking. C’est le roi des Eluths qui ruina cette pagode en l'année 1688 après la défaite des Kalkas. Nous allâmes ensuite camper dans une autre plaine, un peu moins grande que celle du jour précédent, toujours sur les bords de la rivière de Toula, qui a de très beaux bocages le long de ses bords. Nous ne pûmes prendre la hauteur méridienne, parce que le temps fut couvert, mais nous estimâmes la hauteur du pôle à 47 degrés 55 minutes. Le 5 nous fîmes 50 lys, mais parce que nous fîmes un grand détour du côté du sud, et du sud-ouest dans les montagnes, pour éviter les endroits marécageux qui sont dans la plaine le long de la rivière, il ne faut compter pour toute la route droite que trente-cinq lys à l'ouest-nord-ouest. Nous vînmes encore camper sur les bords de la rivière