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firent de même à son exemple, et il me fit encore l'honneur de m'envoyer des plats de sa table. Le 19 l'empereur partit à la pointe du jour pour la chasse du cerf ; mais avant que d'arriver au rendez-vous, il aperçut un tigre qui se retirait dans une gorge de montagnes propre à le chasser. Sa Majesté envoya en toute diligence appeler ses chasseurs, et il leur fit environner le lieu où l'on avait vu le tigre se retirer ; ce fut inutilement ; le tigre s'échappa sans être aperçu des sentinelles, et par sa fuite il fut cause que l'empereur ne put pas ce jour-là appeler le cerf ; mais il fit faire trois enceintes, dans lesquelles on tua trente ou quarante cerfs et chevreuils. Le temps qui avait été assez serein la nuit, se couvrit dès le matin ; la pluie commença sur le midi, et dura jusqu'au soir ; elle n'empêcha pourtant pas que Sa Majesté ne mangeât, selon sa coutume, au milieu de la campagne, après avoir coupé, accommodé, et rôti sa viande à loisir, comme si le temps eut été le plus beau du monde ; sa présence et son exemple obligèrent tout le monde à faire la même chose. L'empereur se fit un plaisir de voir, qu'à l'exemple de toute sa cour, j'allais prendre un morceau de viande du cerf, et que je le rôtissais moi-même, sans attendre sur cela ses ordres, il eut la bonté de m'envoyer une partie de la viande qu'il avait coupée, accommodée, et rôtie lui-même de sa main. Nous revînmes ensuite au camp bien mouillés, la pluie dura jusqu'à l'entrée de la nuit, qu'il s'éleva un vent de nord fort violent, qui refroidit extrêmement l'air. Le 20 à la pointe du jour nous partîmes à la suite de l'empereur pour la chasse de l'appeau du cerf ; Sa Majesté sortant de sa tente m'aperçut, et voyant que je n'étais point vêtu de fourrure, elle me demanda si je n'en avais pas apporté ; je lui répondis que j'en avais, mais que le froid ne me paraissait pas encore assez piquant pour m'en servir. Sur quoi il dit à ses gens, que nous autres Européens nous avions du courage, et que nous étions faits à la fatigue ; quelques jours auparavant il avait fait mon éloge en présence de ses courtisans, sur ce que je n'épargnais pas ma peine, que je le suivais partout, et qu'on ne me trouvait jamais à la queue des voyageurs. — L'année passée, me dit-il une autre fois, j'appréhendais pour vous, mais à présent je vous regarde comme un des miens, et en quelque lieu que j'aille, je ne suis plus inquiet sur ce qui vous regarde. Le cerf ne répondit point à l'appeau, ainsi il fallut se contenter de faire des enceintes ; on en fit trois, et l'on y tua encore assez bon nombre de cerfs et de chevreuils, avec cinq sangliers ; trois de ceux-ci furent tués par l'empereur, qui tua pareillement six cerfs. Ces enceintes finies, l'empereur mangea au milieu de la campagne selon sa coutume ; il me donna du foie de cerf, coupé et accommodé de sa main, et m'envoya un plat de sa table. Un régulo mongou, à qui appartient le pays voisin, nommé Onioth, vint ce jour-là se rendre auprès de l'empereur pour le suivre à la chasse. Son frère, avec qui, dès l'année passée, j'avais fait connaissance, y était venu quelques jours auparavant. Le 21 l'empereur partit dès la pointe du jour pour l'appeau du cerf, mais