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par troupes dans ces montagnes ; on en tua en tout trente ou quarante pour le moins. La plupart furent tués ou blessés par ses deux fils ; on ne fit pourtant que deux enceintes qui durèrent cinq ou six heures. Dans la première on avait enfermé un tigre, l'empereur tira sur lui deux coups d'une grande arquebuse, et un coup de fusil, mais comme il tira de fort loin. et que le tigre était dans un fort de broussailles, il ne lui fit pas assez de mal pour l'arrêter, quoiqu'apparemment il le blessât ; car à chaque fois qu'il tira, il fit déloger le tigre du lieu où il était ; enfin à la troisième fois il le fit fuir à toutes jambes, vers le haut de la montagne où le bois était le plus épais. Ce tigre était fort grand et fort haut ; je le vis plusieurs fois à mon aise, parce que j'étais fort proche de l'empereur lorsqu'il le tira, et je lui présentai même la mèche allumée pour mettre le feu à son arquebuse. Comme ces animaux sont extrêmement féroces, l'empereur ne voulut pas qu'on l'approchât de trop près, appréhendant que quelqu'un de ses gens n'en fût blessé ; car pour sa personne il n'y a rien à craindre dans ces occasions. Il est alors environné d'une cinquantaine de chasseurs à pied, tous armés de demies-piques qu'ils savent manier avec adresse, et dont ils ne manqueraient pas de percer le tigre, s'il avançait du côté de l'empereur. Je remarquai en cette occasion la bonté du cœur de ce prince ; car dès qu'il vît fuir le tigre du côté opposé à celui où il était, il cria qu'on le laissât fuir, et que chacun se détournât pour n'être point blessé ; il dépêcha en même temps un de ses gens, pour savoir si personne ne l'avait été ; on lui rapporta qu'un des chasseurs Mongous avait été renversé lui et son cheval d'un coup de pâte que le tigre lui avait donné, le trouvant à sa rencontre lorsqu'il fuyait, mais qu'il n'en avait pas été blessé, parce que comme il y avait beaucoup de monde qui criait après le tigre pour l'étourdir, il ne s'était point arrêté, et avait toujours continué de fuir. Après la première enceinte finie, pendant que l'on mettait la seconde en ordre, l'empereur s'arrêta sur une éminence ou il mit pied à terre, et prit du thé tartare ; il en fit donner à ses enfants, et à quelques-uns des officiers et des Grands qui étaient autour de sa personne ; il me fit aussi l'honneur de se souvenir de moi, et il m'envoya sa propre tasse pleine d'excellent thé tartare, tel qu'il en avait bu lui-même ; elle me fut encore apportée par le premier eunuque de sa chambre, et en présence de tout le monde. Le soir étant retourné au camp, l'empereur me demanda ce que je pensais de cette chasse, et si on en faisait de semblables en Europe ; il me dit ensuite en riant, qu'il fallait que je prisse un arc et des flèches à ma ceinture, et qu'il avait remarqué que j'étais assez bon cavalier. Le soir à souper il m'envoya trois plats de sa table ; dans l'un était de la chair de sanglier, dans l'autre une perdrix et des cailles ; le troisième plat était de pâtisserie la plus fine qui se fasse pour lui. Durant la chasse de ce jour-là, outre plusieurs faisans, perdrix, et cailles que l'on prit avec l'oiseau, on prit deux autres oiseaux d'une espèce particulière, et