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là et au commencement de la nuit il plut un peu. Le 17 nous fîmes seulement quarante lys, et nous campâmes dans une vallée nommée Hou pe keou, sur les bords d'une petite rivière qu'on appelle Kakiry. L'empereur passa au-delà du lieu destiné au campement, pour aller à la chasse. Dans la première enceinte qu'il fit faire, on enferma un chevreuil, un renard, et quelques lièvres. Le chevreuil s'échappa ; Sa Majesté tua le renard en courant du premier coup de flèche qu'il tira sur lui, ensuite il monta jusque sur la cime d'une montagne fort haute et toute couverte de broussailles ; comme cette montagne était fort roide, nos chevaux suèrent beaucoup, et je fus surpris que l'on pût monter et descendre des montagnes si escarpées, surtout quand je vis les gens qui portent les ordres de l'empereur, courir en montant et en descendant presque comme s'ils eussent été en rase campagne. Ce jour-là Sa Majesté s'arrêta sur une petite éminence, pour prendre une certaine boisson rafraîchissante nommée tchao mien ; elle est composée de farine faite d'une espèce de blé de Turquie, ou de millet mêlée avec du sucre et de l'eau, le tout bien battu. Quand Sa Majesté en eut bu, elle en fit donner à son fils, à ses deux gendres ; et à quelques-uns des Grands de sa cour et de ses officiers. Elle me fit aussi l'honneur de m'envoyer du thé tartare de sa bouche, et dans sa propre coupe, supposant que je n'étais pas habitué à l'autre boisson ; ce fut le premier eunuque de la chambre qui me l'apporta lui-même, en présence de Sa Majesté et de toute sa cour. J'observai que quand l'empereur prit cette boisson de tchao mien tout le monde se mit à genoux, et battit du front contre terre. Le soir on amena dans le parc où l'empereur était campé plusieurs anciens officiers, qui ont été relégués en un village voisin du lieu où nous étions campés ; Sa Majesté leur fit faire l'exercice par gestes, car ils n'avaient point d'armes. Je ne vis rien en ces gens-là qui marquât une adresse extraordinaire, quoiqu'ils passent pour être habiles à manier les armes. Le 18 nous ne fîmes que quarante lys ; nous campâmes en un lieu nommé Quatiym, sur le bord de la même rivière de Kakiry. L'empereur alla à la chasse comme à l'ordinaire. On avait enfermé dans une enceinte neuf ou dix grands cerfs, mais ils s'échappèrent tous ; l'on ne tua que quelques lièvres ; et on ne prit que quelques faisans avec l'épervier, comme on avait fait les jours précédents ; car il y a toujours quantité d'oiseaux de proie petits et grands, qui suivent l'empereur. Le soir après être arrivés au camp, et avoir un peu reposé, Sa Majesté se divertit à tirer de l'arbalète et de l'arc. L'empereur en tire également bien de la main droite et de la main gauche, et à dire vrai, je n'ai vu aucun Grand de sa cour qui en tire mieux que lui. Le 19 nous fîmes encore quarante lys dans une plaine qui s'appelle Cabaye, sur le bord d'une petite rivière nommée Chantou, le long de laquelle était autrefois bâtie la ville de Chantou, où les empereurs de la famille des Yuen tenaient leur cour durant l'été, on en voit encore les restes. L'empereur