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après m'avoir encore envoyé à manger de sa table, il me fit venir en sa présence, et revit avec moi plus de dix propositions de trigonométrie, dont je lui expliquai les démonstrations qu'il entendit bien ; je fus une bonne heure avec lui, toujours assis à son côté. Incontinent après que je l'eus quitté, il m'envoya une demie porcelaine de vin de sa bouche, ordonnant qu'on me le fît boire entièrement, ce que je ne fis pourtant pas ; et le lendemain il m'envoya demander si je m'étais ressenti du vin qu'il m'avait fait boire la veille. Le 11 nous partîmes à la pointe du jour, comme les précédents, nous dînâmes à un village nommé Chin choan à trente lys de Mi yun, et nous couchâmes dans un bourg nommé Che hia, nous fîmes en tout 60 lys. Un peu après que nous fûmes arrivés, l'empereur m'envoya demander de combien la hauteur du pôle était plus grande qu'à Peking et quel changement il y avait à faire dans le calcul de l'ombre méridienne ; ensuite il sortit de sa chambre, et vint dans la cour tirer sur des moineaux et sur des pigeons, avec une arbalète et une sarbacane. J'étais dans cette cour où je lui vis prendre ce divertissement ; il tira trois pigeons de suite avec l'arbalète ; il me demanda si je savais tirer de l'arc, et lui ayant répondu que non, et que nous n'apprenions point en Europe de cet exercice : — Il est vrai, dit-il, ils ne se servent que d'armes à feu ; il rentra ensuite dans sa chambre, et alla reposer, comme il a accoutumé de faire tous les jours sur le midi durant les chaleurs. Le 12 étant parti à la pointe du jour, l'empereur vint dîner à un village nommé Laoquatien à trente lys de Che hia, ensuite nous couchâmes à Kou pe keou, où est une des portes de la grande muraille ; nous fîmes ce jour-là 60 lys en tout. Une demie lieue avant que d'y arriver, nous trouvâmes toute la soldatesque chinoise, qui compose la garnison de la forteresse, et qui défend le passage de ce détroit, rangée en bataille sur le bord du grand chemin ; elle consistait en sept ou huit cents fantassins, et environ cinquante chevaux, L'empereur s'arrêta d'abord pour les voir, ensuite il monta sur une éminence et mit pied à terre pour leur voir faire l'exercice ; j'étais à huit ou dix pas derrière l'empereur, pendant que cette milice fit l'exercice ; elle était d'abord rangée sur huit lignes, entre lesquelles était un espace vide de cinq ou six pas, il n'y avait qu'un soldat de file à chaque ligne ; il parut cinquante ou soixante affûts de petits canons ; comme ces affûts n'étaient que de petites charrettes couvertes, je ne vis pas s'il y avait des canons ; ces charrettes n'étaient pas traînées par des chevaux, mais poussées par des hommes à force de bras. Il y avait sur les deux ailes de l'infanterie, quelque peu de cavalerie, ils firent différents mouvements, et tirèrent plusieurs fois ; le signal du commandement était de tirer un ou deux coups de mousquet de dessus une éminence voisine, auxquels on répondait premièrement du milieu du bataillon, et ensuite on entendait le bruit de leurs instruments, qui ne consistaient qu'en des cornets, dont le son est fort sourd, et quelques bassins de cuivre sur lesquels on frappe, et en d'autres instruments à peu près semblables. Les mouvements