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jaune, avec des dragons et autres ornements en broderie d'or ; sur le devant pendaient deux autres morceaux de satin, dont le bout était enrichi d'orfèvrerie avec quelques pierres de couleur fort simple, et qui ne peuvent pas être mises au nombre des pierreries, car elles n'ont aucun éclat. Aux deux côtés de la salle dans le même endroit où nous avions mangé, on rangea des tables sur lesquelles on mit le couvert pour les Grands ; ces tables n'étaient hautes que d'un pied ou environ ; car ils devaient être assis à terre sur de simples coussins. Les mets consistaient en des morceaux de différentes viandes froides, arrangées en espèce de pyramide, et en des gelées faites de racines ou de légumes mêlés avec de la farine ; les mets qui étaient sur la table de l'empereur étaient ornés de fleurs de différentes sortes (car on a soin d'en garder tout l'hiver pour l'empereur, et il y en a ordinairement dans de grands vases de porcelaine, ou dans des caisses de bois vernissées qui ornent sa chambre ; c'en est la plus belle décoration, car tout le reste y est d'une grande simplicité) ; dans un coin de la salle on avait fait un retranchement avec un paravent, et ce fut là que se mirent les musiciens et les joueurs d'instruments, qui sont bien éloignés de la perfection et de la délicatesse des nôtres, quoique les Chinois fassent un grand cas de la musique, et qu'ils aiment à toucher des instruments. Nous vîmes aussi de jeunes eunuques âgés d'environ dix ou douze ans, habillés en comédiens, qui devaient faire divers tours de souplesse durant le festin, pour le divertissement des convives. J'en vis deux se renverser la tête en arrière, la faire toucher presqu'à leurs talons, se relever ensuite d'eux-mêmes sans avoir changé de place, et sans avoir remué ni pieds ni mains. Sur le soir on nous mena sur un traîneau voir les feux d'artifice qui étaient préparés vis-à-vis de l'appartement des reines. Outre l'empereur et ses enfants, il y eut encore une vingtaine des plus grands seigneurs de la cour qui assistèrent à ce spectacle, et ce fut proche d'eux que nous fûmes placés ; je ne vis rien en tous ces feux d'artifice qui fût extraordinaire, à la réserve de quelques lumières qui s'allument les unes les autres, et dont la clarté approche beaucoup de celle des plus éclatantes planètes, ce qui se fait avec du camphre ; du reste il n'y avait rien qui ne fût bien au-dessous de nos feux d'artifice ; ce n'étaient que pluie et jets de feu, et des fusées qui s'allumaient les unes les autres. La première fusée partit immédiatement de devant l'empereur, et on dit qu'il y avait mis le feu. En s'allumant elle partit comme un trait, et alla allumer un des feux d'artifice qui en était éloigné d'environ trente ou quarante pas. De celui-là il sortit une autre fusée qui alla allumer un autre feu, et de celui-ci il en partit une troisième, et tous les feux qui étaient disposés en différents endroits, furent ainsi allumés les uns par les autres, sans que personne y touchât. Je remarquai encore que leurs fusées n'étaient pas attachées à des baguettes comme les nôtres ; ces feux durèrent environ trois quarts d'heure ou une heure au plus ; outre cela il y avait partout