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Le septième nous allâmes dès le matin à la maison de plaisance de l'empereur, et après notre explication de mathématique, il nous envoya à manger de sa table ; il y avait entr'autres choses deux grands plats de poisson, dont l'un était une grande truite saumonée, et l'autre était un morceau d'un grand poisson qu'ils appellent Tching hoang yu, qui passe pour être le meilleur qui se mange à Peking. Ce poisson a en effet la chair fort délicate, vu sa grosseur, car il pèse plus de deux cents livres ; le morceau que l'empereur nous envoya était de douze à quinze livres. Le 11 étant allés à la maison de plaisance de l'empereur, nous le trouvâmes en habit de cérémonie. Cet habit consistait en deux vestes, sur lesquelles il y avait quantité de dragons en broderie d'or ; la veste longue était d'un fond jaune, tirant un peu sur la feuille morte ; celle de dessus était d'un fond de satin violet, l'une et l'autre doublée de peaux d'hermine blanche comme neige et fort fine ; ce prince nous envoya encore un régal d'excellent poisson. Il nous ordonna de venir tous le jour suivant à la cour, et il nous fit envoyer des chevaux de son écurie. En retournant nous trouvâmes en chemin le prince héritier, qui nous fit l'honneur de nous demander des nouvelles de notre santé ; il avait au col une espèce de chapelet de grosses perles, qui paraissaient la plupart fort rondes. Le 12 nous allâmes à la maison de plaisance de l'empereur sur des chevaux de son écurie, qu'on nous avait amenés par son ordre. C'étaient de petits chevaux de la province de Se tchuen pleins de feu, et qui marchent fort vite sans fatiguer le cavalier. Parmi ces chevaux il y en avait un de la Corée qui était un peu plus haut que les autres, mais qui avait aussi beaucoup plus de feu et qui marchait bien plus vite. Dès que nous fûmes arrivés, Sa Majesté nous fit conduire dans la salle où il loge ordinairement, et où nous lui avions fait nos explications l'été passé. On nous y fit asseoir sur des petits carreaux, et peu après on nous apporta une table chargée de viandes froides, de fruits, de confitures, et de pièces de pâtisserie. L'empereur ordonna qu'on nous servît deux de ces tables, mais les eunuques ne nous en servirent qu'une, et il nous dirent pour excuse, qu'en apportant la seconde, elle était tombée en chemin et s'était fracassée ; ils nous firent prier par un de leurs chefs, qui est fort de nos amis, de leur pardonner cette faute, et de ne pas leur en faire une affaire auprès de l'empereur, apparemment qu'ils avaient oublié de préparer cette table à temps. Après que nous eûmes goûté de ces mets, (car nous ne fîmes qu'y toucher,) nous en envoyâmes une partie aux chefs de l'appartement du palais où nous faisions nos explications, et on porta le reste à nos domestiques, qui étaient demeurés à la porte. Peu de temps après que nous eûmes mangé, on vint mettre le couvert pour l'empereur, et pour douze ou quinze grands de la cour qu'il régalait ce jour-là. Le couvert de l'empereur fut mis au milieu du fonds de la salle sur une grande table carrée vernissée de rouge, avec des dragons et d'autres petits ornements peints en or ; les Tartares ni les Chinois ne se servent ni de nappes, ni de serviettes ; on mit seulement à cette table un tour de satin