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Mongous, commandées par leurs régulos et leurs taikis ; l'empereur leur avait déjà ordonné de se tenir sous les armes, pour observer les mouvements des Eluths, qui sous prétexte d'en vouloir seulement aux Kalkas, ainsi qu'ils l'avaient protesté, pourraient bien piller aussi les Mongous sujets de cet empire, si on ne le mettait en état de leur faire tête ; et c'est pour cela que l'empereur y avait envoyé il y a deux mois un Grand de sa cour avec quelques troupes, pour traiter avec le roi d'Eluth, et terminer le différend qu'il avait avec les Kalkas, qui se sont faits depuis peu vassaux de cet empire. Le 25 l'empereur ayant fait publier la nuit précédente qu'il avait dessein d'envoyer un gros corps de troupes au devant des Eluths, et qu'il irait lui-même en personne de ce côté-là dans un mois, en chassant selon sa coutume, tous les régulos, les Grands de la cour, les mandarins d'armes, et même la plupart des mandarins tartares, ou chinois tartarisés, demandèrent avec empressement d'être envoyés à cette guerre. C'est ce qu'ils ont accoutumé de faire lorsqu'il y a quelque nécessité, et quoiqu'il y en ait peu qui fassent volontiers ces sortes de voyages, à cause de la fatigue et des dépenses qu'il leur faut faire pour leur équipage ; cependant l'usage et la crainte de perdre leurs charges, les obligent de s'offrir à l'empereur pour ces sortes d'expéditions. Le 30 étant allés au palais, nous trouvâmes l'empereur de retour de sa maison de plaisance de Tchang tchun yuen. Il me fit dire que son intention était que nous le suivissions en Tartarie le père Pereira et moi, et que nous irions encore avec son oncle maternel, comme nous avions fait dans les deux voyages précédents. Il nous fit donner huit chevaux pour les domestiques qui devaient nous accompagner, et trois chameaux pour porter notre bagage. Ce même jour l'empereur ayant appris que les soldats qui devaient partir pour aller contre les Tartares d'Eluth, ne trouvaient de chevaux à acheter qu'à un prix excessif, leur donna pouvoir de prendre tous ceux qui se trouveraient hors de la ville des Tartares, en payant vingt taëls pour les chevaux qui seraient gras, et douze pour ceux qui seraient maigres. Cette permission donna lieu à de grands désordres, principalement dans la ville des Chinois ; on y enleva impunément, non seulement les chevaux qui se trouvaient dans les rues et dans les maisons des particuliers, soit mandarins, soit marchands, ou autres, mais encore les mules et les chameaux. On obligeait les personnes les plus graves, et les mandarins les plus considérables qui se trouvaient dans les rues, à mettre pied à terre ; on alla jusque dans la maison du premier colao chinois, auquel on enleva tout ce qui se trouva de chevaux, de mules, et de chameaux ; on prit aussi delà occasion d'enlever beaucoup d'armes, de harnais, et d'autres choses qui étaient d'usage aux soldats. Comme le désordre était fort grand, les principaux mandarins chinois, entr'autres le premier colao, représentèrent à l'empereur les suites dangereuses que pourrait avoir une semblable licence. L'empereur qui ne prétendait