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jour de mai l'empereur revint à Peking et dès ce jour-là même il se rendit à l'appartement d'Yang sin tien pour y entendre notre explication des éléments d'Euclide ; nous continuâmes les jours suivants, et il y apportait beaucoup d'application. Il ne se passait presque point d'explication qu'il ne nous dît quelque chose d'obligeant sur les sciences d'Europe. De crainte que nous ne fussions interrompus dans le lieu où l'on nous avait placés, et que la chaleur qui était grande ne nous incommodât, il nous fit mettre dans le lieu le plus frais et le plus intérieur de cet appartement, et l'on nous dit que c'était le lieu même où l'empereur se retirait quand il l'habitait, et que personne n'y était introduit, pas même pour le voir, sans un ordre exprès de Sa Majesté. L'empereur continua aussi de nous envoyer de temps en temps des mets de sa table, et souvent après avoir achevé nos explications, il nous faisait plusieurs questions sur les mœurs et les coutumes de l'Europe, et sur les qualités des pays qui y sont ; le tout avec une familiarité qui surprenait ceux de sa cour. Le 25 une troupe de Moscovites, au nombre de quatre-vingt ou quatre-vingt-dix arrivèrent en cette cour ; ils apportaient une lettre des ambassadeurs plénipotentiaires de Moscovie, avec lesquels nous avions conclu la paix entre les deux empires. Cette lettre marquait l'exactitude qu'on avait eue à exécuter le point le plus important de ce traité, qui était la démolition de la forteresse d'Yacsa ; que les ordres avaient aussi été donnés de faire transporter la peuplade des Moscovites, qui était à l'est de la rivière d'Ergoné, aussitôt que l'hiver serait passé. On demandait ensuite que selon les articles du traité de paix, l'on renvoyât au gouverneur de Niptchou quelques troupes de Tartares de Kalka, qui s'étant faits tributaires de l'empire de Moscovie, étaient depuis peu passés sur les terres de la domination de l'empire de la Chine. L'empereur venant ce jour-là entendre notre explication, nous mit lui-même entre les mains la version latine de cette lettre, et nous en demanda l'interprétation, que nous lui fîmes de vive voix, après quoi Sa Majesté nous témoigna qu'elle était contente des Moscovites. Elle nous ajouta que selon les apparences, ceux-ci ne venaient que pour trafiquer, et qu'ils avaient amené soixante charrettes chargées de pelleteries. Le vingt-deuxième de juin l'empereur qui depuis le commencement du mois avait demeuré à Yntai, maison de plaisance située le long du lac dont j'ai parlé, alla en son autre maison de plaisance de Tchang tchun yuen, et nous ordonna de nous y rendre de deux jours l'un. Tout le temps qu'il fut à Yntai nous y allâmes tous les jours, et une fois Sa Majesté nous fit donner une grande quantité de poissons qu'il avait pêchés lui-même dans l'étang de son jardin, ce qui passa pour une faveur singulière. Le vingt-quatre de juillet on apprit que le roi d'Eluth s'était avancé avec une armée de vingt ou trente mille hommes vers les États des Mongous, qui sont vassaux de cet empire ; l'empereur résolut sur-le-champ de renforcer les troupes qui sont dans ces quartiers-là, composées la plupart de