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Bouvet ; je lui répondis qu'il avait fait les mêmes progrès que moi dans la langue tartare, et qu'il savait de même les mathématiques, et les autres sciences d'Europe. Le 21 Sa Majesté fit seulement appeler les pères Thomas et Pereira, lorsque nous sortions actuellement du palais, pour se faire répéter une explication, et il fit dire qu'il n'était pas nécessaire que le père Suarez revint davantage. Le 22 les deux pères furent encore appelés comme le jour précédent, et l'empereur n'ayant pas pu bien entendre une pratique de géométrie qu'ils lui expliquèrent, il les renvoya de bonne heure. Peu après il nous envoya ordre de délibérer entre nous le père Bouvet et moi, lequel serait le plus à propos pour nous perfectionner au plus tôt dans la langue tartare, ou de venir tous les jours au Tribunal du Poyamban (c'est le Tribunal des grands maîtres, et maîtres d'hôtel du palais, où toutes les affaires se traitent en tartare), ou bien de voyager dans les pays des Mantcheoux. Je répondis, que nous n'avions pas à délibérer, puisque Sa Majesté était bien plus éclairée que nous, et qu'elle connaissait mieux le moyen d'apprendre plus facilement cette langue ; que d'ailleurs comme nous ne l'apprenions que pour lui complaire, il nous était indifférent de quelle manière nous l'apprissions, pourvu que Sa Majesté fût satisfaite ; qu'ainsi je la suppliais de nous marquer ses intentions, et que nous étions prêts de faire ce qu'il lui plairait. L'empereur nous envoya dire au même moment, que la saison d'hiver n'étant pas propre à voyager, nous irions tous les jours au Tribunal de Poyamban où il y aurait des gens habiles avec qui nous pourrions nous exercer tant qu'il nous plairait ; que nous prendrions nos repas avec les chefs du Tribunal, et qu'après que le froid serait passé, il nous ferait faire un voyage dans la Tartarie orientale. Le 23 nous allâmes le père Bouvet et moi au palais pour remercier l'empereur de cette faveur. Sa Majesté nous fit dire, qu'il serait temps de la remercier quand nous saurions parfaitement la langue tartare, et peu après il nous admit en sa présence et fit plusieurs questions particulièrement au père Bouvet, qu'il n'avait pas vu les jours précédents. Le soir Tchao laoyé, qui dès la veille avait porté les ordres de l'empereur aux chefs du Tribunal de Poyamban, nous y conduisit lui-même, et nous présenta aux grands-maîtres et au premier maître d'hôtel. Ces messieurs nous reçurent civilement, et nous marquèrent une chambre vis-à-vis de la salle où ils s'assemblent eux-mêmes pour y venir. Dès le lendemain un d'eux vint en personne donner les ordres pour la faire préparer. Le 24 nous commençâmes à aller à ce Tribunal, où on nous donna deux petits mandarins tartares naturels, pour apprendre avec eux la langue, avec ordre de faire tout ce que nous souhaiterions. On en assigna encore un plus considérable, et fort habile dans les deux langues, pour venir une fois tous les