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comme je l'ai déjà dit, quoiqu'il eût été plusieurs fois sollicité d'en nom mer une, les uns disaient que c'était par superstition qu'il ne la nommait pas, craignant que ce nom ne fût fatal à celle qui le porterait, parce qu'il lui en était déjà mort deux ; les autres s'imaginaient que c'était pour la mortifier, parce qu'il la connaissait un peu fière. Quoiqu'il en soit, elle a eu à sa mort et après, non seulement les honneurs, mais encore le titre d'impératrice ; triste consolation pour des personnes qui n'ont aucune espérance après cette vie. L'empereur a aussi fait son père cong du premier ordre ; cette dignité est immédiatement après celle des princes du sang royal, entre lesquels il y en a même plusieurs qui n'ont que cette dignité, et plusieurs aussi qui ne l'ont pas, et qui voudraient bien l'avoir. Ils sont du sang royal, mais ils n'ont point encore mérité de porter le titre de prince, et de recevoir la pension qui est attachée à ce titre. Aussitôt que Kiou kieou eut appris cette nouvelle que nous savions il y a un mois, il se mit à pleurer et à soupirer à haute voix, selon la coutume des Chinois et des Tartares, ensuite il continua sa route avec nous jusqu'à la première poste, qui n'était pas bien loin de l'entrée de cette vallée. Quand il y fut arrivé, il prit aussitôt la poste pour se rendre ce jour-là même auprès de Sa Majesté, que nous sûmes n'être qu'à soixante lys de nous ; pour nous autres nous campâmes proche de cette poste sur le bord d'un gros ruisseau de fort belle eau. Nous fîmes ce jour-là en tout 60 lys au sud-est, et le reste à l'ouest. Le 12 le temps fut serein et en partie couvert, avec un petit vent de sud ; le matin il fit froid, mais ensuite l'air fut assez tempéré. Nous fîmes d'abord dix lys environ à l'ouest, jusqu'à une petite plaine où le fils aîné du roi était venu camper pour aller à l'appel du cerf ; cette plaine est au pied d'une montagne, que les gens du pays appellent Tayn ; nous tournâmes ensuite droit au sud, et nous fîmes à ce rumb cinquante lys jusqu'au camp de l'empereur. Sa Majesté qui avait reçu Kiou kieou le jour précédent, avec de grands témoignages de bonté, lui dit obligeamment, qu'il n'ignorait pas les fatigues que nous avions essuyées, et que nous avions beaucoup souffert dans ce voyage ; qu'il était fort satisfait du succès de la négociation ; et qu'il voulait même donner des marques de son contentement au passage des troupes ; en effet il avait ordonné qu'on distribuât à nos officiers et aux soldats des bœufs, des moutons, de la chair des cerfs qu'il avait tués à la chasse, du vin, du beurre et des chevaux pour tous ceux qui en manquaient ; ce qui fut exécuté ponctuellement. L'empereur revenant le soir, les officiers des troupes de la suite de nos ambassadeurs, Kiou kieou à leur tête, se rangèrent avec nous sur le chemin où il devait passer. Sa Majesté ne pouvant distinguer les personnes, parce qu'il était nuit close, demanda qui nous étions. Kiou kieou ayant répondu au nom de tous, Sa Majesté demanda si tout le monde se portait bien ; après quoi nous allâmes le remercier, en faisant les neuf inclinations accoutumées vis-à-