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Le 8 nous fîmes trente lys au nord, prenant quelquefois un peu de l'ouest dans un pays plus inégal que le jour précédent, mais toujours aussi stérile ; nous vînmes camper en un lieu nommé Tonnedadou Nohassukin, sur les bords d'un ruisseau qui s'appelle Oughestchin, et qui ne coule pas fort loin. Il y avait de l'eau suffisamment, du fourrage aux environs, et assez près une source d'eau très bonne à boire. Cet endroit est déjà au-delà des limites de cette partie de la Tartarie, qui est sujette à l'empereur ; il n’est pourtant pas encore proprement de l'empire de Kalka mais c’est comme un lieu neutre entre les deux empires, on appelle ces limites Carou. Je pris hauteur méridienne du soleil que je trouvai de soixante-cinq degrés et demi, ou de soixante-six degrés ; car je ne pus pas bien reconnaître laquelle des deux était la plus juste, parce que le temps était couvert, et que le soleil ne se découvrait qu'un moment à différentes reprises, de sorte que je ne m'assure pas trop de la justesse de cette hauteur. Le temps fut extrêmement pluvieux tout le jour, et accompagné d'un grand vent de nord, qui nous poussant la pluie au visage avec violence, nous incommoda beaucoup, et nous empêcha de faire une plus longue journée, il fit aussi de grands éclats de tonnerre. Le 9 nous fîmes 41 lys au nord-nord-ouest dans un pays assez inégal au commencement, et ensuite plus uni ; comme il avait beaucoup plu les jours précédents, il y avait presque partout de bons fourrages ; nous campâmes au-delà des limites véritables des deux empires proche d'une petite rivière nommée Tchono. En y arrivant, un taiki ou prince du sang des rois de Kalka, vint au devant de nos ambassadeurs. Lorsqu'il fut proche de nous, on mit pied à terre de part et d'autre, et ce taiki s'étant avancé, se mit à genoux pour demander des nouvelles de la santé de l'empereur ; ensuite s'étant levé, il salua nos ambassadeurs en leur touchant les deux mains avec les siennes, après quoi il remonta à cheval, et s'en retourna. Ce prince paraissait âgé, il était fort blanc de visage, mais du reste il avait la physionomie plate ; il avait peu de suite avec lui, excepté trois ou quatre personnes qui étaient ses enfants, ou ses proches parents, lesquels avaient chacun une veste de soie, aussi bien que lui ; tout le reste était misérablement vêtu, et faisait une pitoyable figure. Sur le soir il envoya à nos ambassadeurs trois chevaux, trois chameaux, six bœufs, et cent cinquante moutons ; on accepta seulement les bœufs et les moutons qu'on paya au double en pièces de soie et de toile, en thé et en tabac, qui sont les seules choses que ces Tartares recherchent, ne sachant ce que c’est qu'argent ou que curiosités. On nous dit que ce prince avait été obligé d'abandonner les terres qui sont plus au nord, par la crainte des Moscovites, avec lesquels les Tartares de Kalka ne sont plus en bonne intelligence ; et on ajouta qu'il avait également peur des Tartares, qui ravagèrent l'année passée le royaume de Kalka et contraignirent le roi de se retirer sur les terres de l'empereur de la Chine, où il est encore. Ce taiki