Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/186

Cette page n’a pas encore été corrigée

peuplade que nous laissâmes au nord, et nous fîmes dix lys au sud, montant et descendant une montagne, et différentes petites hauteurs, puis nous fîmes encore dix lys au sud-ouest, partie en tournant dans une vallée, partie en montant et descendant des hauteurs ; après quoi nous entrâmes dans une plaine toute cultivée qui appartient à Kiou kieou, aussi bien que les environs. Au bout de cette plaine est une grande métairie bâtie de terre et de bois, et couverte de paille ; il y a un grand enclos de murailles de terre environnées de hautes palissades de bois de sapin, pour mettre la nuit les bestiaux à couvert des tigres, dont il y a grande quantité dans les bois qui sont sur les montagnes des environs. Nous rencontrâmes sur tout le chemin de distance en distance différentes peuplades de Chinois esclaves des régulos, des princes, et d'autres Grands de la cour, à qui l'empereur a donné ces terres en partage ; elles sont la plupart bien cultivées, et très fertiles en millet et en séveroles, dont on nourrit les chevaux ; comme il fait extrêmement froid en ce pays pendant l'hiver, et que la terre est gelée pendant huit ou neuf mois, elle ne peut porter ni blé, ni riz ; on y sème et on moissonne le millet et les séveroles en trois ou quatre mois de l'été. Les Chinois ont bâti des maisons de terre et de bois au pied des montagnes ; leur esclavage est bien plus tolérable que celui de Peking, où ils sont continuellement sous les yeux de leurs maîtres. Ici personne ne les inquiète ; ils n'ont que le soin de cultiver les terres qu'on leur confie, et de nourrir les bestiaux, c'est-à-dire, les chevaux, les bœufs, les moutons, les pourceaux, les oies, les canards, et les poules, afin d'en fournir à leurs maîtres, principalement lorsqu'ils viennent à la chasse avec l'empereur. Ils ont chacun leurs petits jardins où ils sèment des herbages, et des légumes qui y croissent en abondance ; il y en a même qui produisent d'excellents melons d'eau. La même rivière, qui se forme des ruisseaux dont j'ai parlé ci-devant, coule le long de la grande vallée dans laquelle est le grand chemin de Peking et se grossit des ruisseaux qui viennent des montagnes voisines ; cette vallée est ordinairement de la largeur d'environ trois lys, elle s'étrécit extrêmement en quelques endroits, où il n'y a que des passages fort étroits, environnés de part et d'autre de rochers fort escarpés, dont le sommet est couvert de grands pins, qui sont un agréable spectacle. Je puis dire sans exagération, que je n'ai guère vu de plus beaux paysages ; la rivière était presque partout couverte de grosses pièces de bois de sapin que l'on laisse flotter, ou dont on fait de gros trains pour les conduire à Peking ; elle est presque partout très rapide, quoiqu'elle serpente de telle sorte que nous la passâmes six fois à gué en moins d'une demie lieue ; nous vîmes dans tous ces endroits grande quantité de faisans. Le temps fut couvert presque tout le matin que dura un grand vent de sud-ouest ; l'après-midi il se découvrit, et le soir il fut fort serein et sans le moindre souffle de vent.