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quelques-uns qui venaient camper dans ces montagnes, où ils commencèrent à dresser leurs tentes. Ils se réfugiaient du côté du nord, pour éviter le roi d'Eluth qui était entré dans leur pays avec une grosse armée. J'avais peine à comprendre comment ils pouvaient nourrir la quantité de chameaux, de chevaux, de vaches et de moutons qu'ils avaient, dans un pays où il ne paraissait aucun fourrage ; et comment ils pouvaient eux-mêmes demeurer au milieu de ces sables brûlants, sur lesquels leurs enfants, et une partie des femmes marchaient pieds nus. Les enfants avaient la peau à demi brûlée du soleil : néanmoins les hommes paraissaient vigoureux et dispos. Il en vint un grand nombre dans notre camp visiter Kiou kieou, et faire leur commerce : c'est-à-dire, troquer leurs bestiaux avec de la toile, du tabac, et du thé. Quelques-unes des principales femmes de leur habitation vinrent présenter à Kiou kieou de leur thé, qui était dans des vases fort malpropres ; les hommes lui firent aussi présent de deux ou trois moutons, pour lesquels il leur fit donner du tabac, etc. Les femmes sont vêtues modestement : elles ont une robe qui leur prend depuis le col jusqu'aux pieds ; leur coiffure est ridicule, elle consiste dans un bonnet, à peu près semblable à celui des hommes. Quand on voit leur visage hideux, et les boucles de cheveux qu'elles laissent tomber sur leurs oreilles, on les prendrait pour de vraies mégères : la plupart de ces femmes vinrent dans notre camp faire leur petit commerce, troquant leurs bestiaux pour de la toile, du sel, du tabac, et du thé : nos gens changèrent la plupart de leurs chevaux et de leurs chameaux, qui étaient las et maigres, contre d'autres tous frais, en donnant quelque chose de retour à ces Tartares, qui ne veulent point prendre d'argent, mais seulement de la toile, etc. Il fit tout le jour un temps fort serein, mais extrêmement chaud, car il ne fit de vent que par intervalle. Il y avait là une fontaine de bonne eau. Le 9 nous séjournâmes dans notre camp pour attendre ceux qui étaient derrière, et marcher ensuite du côté par où venaient les deux autres troupes, afin de nous réunir et de délibérer sur ce que nous aurions à faire dans la conjoncture présente. Le roi d'Eluth, à ce que nous apprîmes, était entré dans le pays de Kalka avec lequel il était en guerre ; et la terreur de ses armes avait mis tous les Tartares en fuite. Le Grand lama, frère de l'empereur de Kalka, s'était même sauvé jusques vers les frontières de la Chine. Ces nouvelles nous furent confirmées l'après dinée par des gens de So san laoyé qu'il envoyait à Kiou kieou pour lui en donner avis, et pour le prier de l'attendre au lieu où il se trouverait, en cas qu'il y eût de l'eau et du fourrage suffisamment pour toute leur suite quand ils seraient réunis ; ou de le venir trouver, afin de délibérer tous ensemble sur ce qu'ils auraient à faire : il ajoutait qu'il avait dépêché un courrier à Peking pour informer l'empereur de ce qui se passait, et lui demander ses ordres. Comme il n'y avait