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de gâteaux longs et déliés comme des brins de paille, faits avec de la farine et de l'huile, qui saisissaient l'odorat de fort loin. Après cette collation, à laquelle nous n'eûmes garde de toucher, mais dont nos Tartares et leurs gens s'accommodèrent fort bien, on rapporta une seconde fois du thé. Peu après on rapporta les mêmes tables chargées de viandes et de riz : il y avait sur chaque table un grand plat plein de viande de bœuf et de mouton à demi cuite, une porcelaine de riz fort blanc et fort propre, une autre porcelaine pleine de bouillon ; du sel détrempé dans de l'eau et du vinaigre ; de semblables mets furent servis aux gens des ambassadeurs qui étaient assis derrière nous. Ce qui me surprit, ce fut de voir des mandarins illustres dévorer cette viande à demi cuite, froide, et si dure, qu'en ayant porté un morceau à la bouche pour en goûter, il me fallut la rejeter sur-le-champ. Mais personne ne fit si bien son personnage que deux Tartares Kalkas qui étaient survenus pendant qu'on était à table : ayant fait l'adoration, et reçu l'imposition des mains de l'idole vivante, ils donnèrent sur un de ces plats de viande avec un appétit surprenant, et prenant chacun un morceau de viande d'une main, et leur couteau de l'autre, ils ne faisaient que couper de grosses tranches, particulièrement de graisse, les tremper dans l'eau salée, et les avaler. Après qu'on eut desservi, on apporta encore du thé, puis on s'entretint quelque temps : l'idole vivante garda fort bien sa gravité. Je ne crois pas que pendant tout le temps que nous fûmes là, il dit plus de cinq ou six paroles, encore n'était-ce que tout bas, et pour répondre à quelques questions que lui firent les ambassadeurs : il ne laissa pas de tourner les yeux de divers cotés, et de regarder attentivement tantôt l'un, tantôt l'autre, et même de sourire quelquefois. C'était un autre lama lequel était assis près d'un des ambassadeurs, qui soutenait la conversation : apparemment que c'était le supérieur ; car tous les autres lamas qui servaient à table indifféremment avec les valets, prenaient ses ordres. Après une courte conversation, les ambassadeurs se levèrent, et allèrent autour de la pagode, pour en examiner les peintures, qui sont fort grossières à la manière des Chinois. Cette pagode a environ quarante-cinq pieds en carré, et dans le milieu, il y a un carré oblong de 20 pieds, à peu près sur 12 ou 13 de largeur, dont le lambris est fort élevé. Cet endroit est bien éclairé. Autour de ce carré oblong sont d'autres petits carrés, dont le lambris est fort bas et fort grossier. Il y a cinq rangs de colonnes, qui sont interrompus dans le carré oblong. Le lambris, les murailles, et les colonnes sont peintes simplement et sans dorure. Il n'y a aucune statue comme dans les autres pagodes : on y voit seulement des figures de divinités peintes sur les murailles. Dans le fond de la pagode est un trône ou espèce d'autel, sur lequel est placée