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pas maintenant le moindre vestige de quantité de bourgs et de villages qui subsistaient avant la guerre. Car le petit roi des Tartares qui commença à l'allumer, n'ayant d'abord qu'une fort petite armée, fit prendre les armes aux habitants de ces lieux-là ; et il les fit détruire ensuite, pour ôter aux soldats l'espérance de retourner jamais dans leur terre natale. La capitale de Leao tong, qu'on nomme Chin yang, est une ville assez belle et assez entière : il y a même encore un reste d'un ancien palais. Elle est, autant que je l'ai pu remarquer par plusieurs observations, à 41 degrés 56 minutes, c'est-à-dire, deux degrés au-dessus de Peking quoique jusques à présent, et les Européens et les Chinois ne lui aient donné que 41 degrés. Il n'y a dans cette ville aucune déclinaison de l'aimant, comme je l'ai remarqué par plusieurs observations réitérées. La ville d'Oula, qui était presque le terme de notre voyage, est à 43 degrés environ 50 minutes. La boussole y décline du midi à l'occident, d'un degré 40 minutes.

Mais reprenons la suite de notre voyage. Depuis Peking jusqu'à cette extrémité de l'orient on fit un nouveau chemin, par lequel l'empereur pouvait marcher commodément à cheval, et les reines sur leurs chars. Ce chemin est large d'environ dix pieds, le plus droit, et le plus uni qu'on l'ait pu faire. Il s'étend jusqu'à près de 1100 milles. On avait fait des deux côtés une espèce de petite levée haute d'un pied, toujours égale et parfaitement parallèle l'une à l'autre. Ce chemin était aussi net, surtout quand le temps était beau, que l'aire où les laboureurs battent le blé dans les campagnes, aussi y avait-il des gens qui n'étaient occupés qu'à le nettoyer. Les chrétiens n'ont pas tant de soin de balayer les rues et les places publiques où le Saint Sacrement doit passer dans les processions, que ces infidèles en ont de nettoyer les chemins par où doivent passer leurs rois et leurs reines, toutes les fois qu'ils sortent de leur palais. On fit pour le retour un chemin semblable au premier. On avait aplani les montagnes autant qu'on l'avait pu : on avait dressé des ponts sur les torrents, et pour les orner, on avait tendu des deux côtés une espèce de nattes, sur lesquelles étaient peintes diverses figures d'animaux, qui faisaient le même effet que les tapisseries qu'on tend dans les rues aux processions. L'empereur ne suivait presque jamais ce chemin, chassant presque toujours : et lors même qu'il joignait les reines, il le côtoyait seulement, de peur que le grand nombre de chevaux qui étaient à sa suite ne le gâtassent : il marchait ordinairement à la tête de cette espèce d'armée. Les reines le suivaient immédiatement sur leurs chars, avec leur train et leurs équipages. Elles laissaient néanmoins quelque intervalle entre lui et elles : ensuite marchaient les régulos, les Grands de la cour, et les mandarins, chacun selon son rang. Une infinité de valets, et d'autres gens à cheval faisaient l'arrière-garde. Comme il n'y avait point de ville sur toute la route, qui pût ni loger une si grande multitude de gens, ni leur fournir des vivres, et que d'ailleurs on devait