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dans les provinces méridionales, où il est à bon compte ; mais il n’est pas comparable à celui de la province d’Yun nan. Un médecin lettré en apporte la raison : c’est que le fou lin de la province de Tche kiang, étant d’une matière spongieuse, a moins de corps et de force que celui de la province d’Yun nan, et ne pourrait résister à l’air vif et nitreux de Peking : au contraire, le fou lin des provinces d’Yun nan et de Chen si est compacte, a peu de pores, et a beaucoup de poids.

Cette différence de tissure, ainsi que le remarque un auteur chinois, vient de ce que les pins montagnards, tels que sont ceux des provinces de Chen si et d’Yun nan, sont d’une matière bien plus massive, que ne le sont les pins maritimes, ou ceux qui croissent à peu de distance de la mer.

Mais, dira-t-on, à quel propos parler ici de pins ? En voici la raison ; et elle appuie la conjecture déjà faite sur la nature du fou lin. L’Herbier chinois, dit le P. Dentrecolles, assure, 1°. Que le bon fou lin se trouve dans la terre, sur les montagnes, ou dans les vallées voisines des endroits où de vieux pins ont été coupés. 2°. Que c’est de la substance la plus spiritueuse échappée de ces pins, et répandue dans le terroir, qu’il est formé, et qu’il reçoit son accroissement.

Sur quoi j’ai jugé que le fou lin pourrait bien se former et croître de la même manière que les truffes, qui ne tiennent à la terre par aucune racine sensible. Peut-être le fou lin est-il une espèce de fungus des grosses racines des pins qu’on a coupés, dont le suc nourricier retenu en bas, se ramasse, et engendre cette substance, qui est d’abord molle, et plus ou moins spongieuse, à proportion de la graisse du pin. Le fou lin que j’ai eu entre les mains, m’a paru n’avoir jamais eu de racines, par où il ait été attaché à celles du pin, et les livres n’en disent rien. Que s’il est fortement attaché aux racines des pins coupés, on pourrait le regarder comme une espèce de guy de ces racines, de même que le pin a souvent au-dehors un guy qui ne lui tient par aucun fibre, quoiqu’il s’en nourrisse. Ce sont là les conjectures de ce Père, qui détermineront peut-être à rechercher en Europe le fou lin dans les montagnes, où depuis longtemps on aura coupé de vieux pins.

Le même médecin, ajoute le Père Dentrecolles, m’ayant assuré qu’on plante le fou lin, et qu’on le cultive, je crus d’abord m’être trompé dans mes conjectures, en le mettant au rang des truffes : mais quand il m’eût ajouté qu’il ne croyait pas, qu’ayant été ainsi planté, il eût une tige et des feuilles, je revins à mon premier sentiment : car ayant lu dans le Dictionnaire de l’Académie, qu’il y a des endroits où l’on replante les petites truffes pour les faire grossir, et qu’étant replantées, elles ne jettent ni tige, ni branches, ni feuilles, il m’a paru qu’il en pouvait être de même du fou lin qu’on replante et qu’on cultive.

Il y a deux observations à faire, que je ne dois pas omettre : la première, c’est que le fou lin, quand on veut en user, se prépare en ôtant la peau qui est inutile, et en donnant deux ou trois bouillons à la substance intérieure. La seconde, c’est que, selon l’Herbier chinois, si