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propres à mon dessein ; et joignant mes réflexions à ce que j’avais appris, je me suis fait un régime de vie, qui m’a parfaitement réussi : car au lieu qu’auparavant j’étais d’une faiblesse et d’une maigreur extrêmes ; en peu d’années je repris de l’embonpoint, et à mon âge j’ai le teint frais, le corps robuste et exempt de toute incommodité, et je me vois le chef d’une nombreuse famille, qui jouit d’une santé parfaite.

Au reste, parmi cette foule de maximes qui m’ont été communiquées de vive voix, ou que j’ai trouvées dans les livres, j’en ai rejeté qui n’étaient pas assez bien fondées : j’en ai éclairci d’autres qui étaient peu intelligibles, et de tout cela je me suis formé un plan de vie, qui m’a établi dans l’heureux état où je me trouve.

Quelques bornées que soient mes connaissances, je crois qu’on me saura gré de les avoir rendues publiques, parce qu’elles peuvent servir à se préserver des infirmités si ordinaires dans la vie, et à se procurer, comme j’ai fait, une agréable vieillesse, sans que l’ouïe, la vue, ni les autres sens se soient affaiblis par le grand âge.

Ces maximes peuvent se réduire à quatre articles, qui consistent à régler, 1° Le cœur et ses affections. 2° L’usage des aliments. 3° Les actions de la journée. 4° Le repos de la nuit.


ARTICLE PREMIER.
Régler son cœur et ses affections.


Le cœur est dans l’homme ce que les racines sont à l’arbre, et la source au ruisseau. Il préside à tout, et dès qu’on a su le régler, les facultés de l'âme et les cinq sens sont pareillement dans l’ordre : c’est pourquoi notre premier soin doit être de veiller sur les désirs et sur les affections de notre cœur : et pour y réussir,


I.

Ne vous occupez que de pensées qui vous portent à la vertu. Les principaux devoirs de la société se rapportent à la fidélité qu’on doit au prince, à l’obéissance envers les parents, à la modération et à l’équité ; C’est sur la pratique de ces vertus, que chacun, lorsqu’il est de retour chez soi à la fin du jour, doit s’examiner sérieusement.

Mais ne vous bornez pas à la seule étude de votre propre perfection ; efforcez-vous encore de rendre votre vertu bienfaisante, et utile. C’est pourquoi, vous vient-il une pensée ? Allez-vous prononcer une parole ? Méditez-vous quelque projet ? Réfléchissez-y auparavant, et demandez-vous à vous-même : ce que je pense, ce que je veux dire ou faire, est-il utile ou nuisible aux autres ? S’il est utile, parlez, ou agissez, sans que les difficultés vous rebutent. S’il est nuisible, ne vous permettez jamais ni ces vues, ni ces entretiens, ni ces entreprises.