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les cérémonies. La fiancée répondit nettement qu’elle ne sortirait point de la maison paternelle. Comme on la pressait de passer par-dessus ces formalités : on dit communément, répondit-elle, qu’en toutes choses il est important de bien commencer et qu’une faute, qui d’abord paraît légère, a souvent de fâcheuses suites. Ce qui est vrai en tout le reste, est-il faux en fait de mariage ? Les devoirs d’époux et d’épouses ne sont-ils pas les premiers qui aient été entre les hommes ? Ne sont-ils pas le principe des autres devoirs de la vie civile ? D’ailleurs la fin du mariage est de soutenir les familles, et de perpétuer, autant qu’il se peut, les honneurs prescrits par les rits à l’égard des ancêtres, en leur donnant une postérité. Or on dit, et il est vrai, que l’eau qui sort d’une source bourbeuse, ne peut former un ruisseau bien clair. Ainsi me marier contre les rits, c’est ce que je ne ferai jamais. On lui intenta procès, elle eut beaucoup à souffrir ; mais elle persista toujours à dire, qu’on lui ôterait plutôt la vie, que d’obtenir son consentement. Ne voulant point se relâcher, elle passa ses jours dans le célibat.


Pe y, fille de Suen kong roi de Lou, fut promise à Kong koang, prince de Song. Le temps des noces étant venu, Kong koang ne vint pas lui-même prendre Pe y. Il se contenta d’envoyer un seigneur en la place. Pe y ne voulait point partir : mais elle se rendit enfin par obéissance à son père et à sa mère. Au bout de trois mois le prince de Song, ayant fait la cérémonie accoutumée de voir la nouvelle épouse dans la salle de ses ancêtres, voulut consommer le mariage. Pe y n’y voulut point consentir, parce qu’il n’avait pas gardé le rit de l’aller prendre lui-même. Il fallut encore pour la fléchir sur cela un ordre pressant du roi son père et de la reine sa mère. Dix ans après elle devint veuve. En cet état comme auparavant elle eut toujours un extrême attachement à ce que prescrivaient les rits.

Une nuit le feu prit à son palais. Sortez, Madame, s’écria-t-on, sauvez-vous, le feu vous gagne. Suivant les rits, répondit-elle, une femme de ma condition ne doit pas paraître, même dans une salle, sans les deux dames d’honneur. Attendons-les, puis je sortirai. L’une étant venue, l’autre ne paraissait point. On pressa de nouveau la princesse de se sauver, et ce ne fut qu’à l’extrémité qu’elle se rendit ; tous les princes de son temps la louèrent et admirèrent sa constance.


Une fille de Song ayant été mariée à un homme de Tsai, le mari fut attaqué d’une maladie dangereuse. La mère de cette jeune femme voulut rappeler sa fille. Non, répondit la jeune femme, je regarde cet accident arrivé à mon mari, comme s’il m’était arrivé à moi-même. D’ailleurs la pratique est qu’une femme vive et meure dans la maison, où elle a une fois été placée. Je n’ai garde de m’en éloigner, pour une fâcheuse maladie, dont mon mari a eu le malheur d’être atteint. Quand nos parents sont malades, si les médecins leur prescrivent l’herbe feou et l’herbe y, nous les allons aussitôt cueillir. Quelque rebutante que soit l’odeur de ces herbes, nous les ramassons à pleines mains, nous en remplissons notre sein, s’il est nécessaire, puis nous en tirons le suc. Dois-je moins faire pour mon mari ? Chacun loua cette jeune