La première agit toujours avec droiture et sincérité : l’autre emploie fort fréquemment la fourberie et le mensonge. C’est sur cette règle, que le sage empereur Yao examinant treize de ses officiers, en retint neuf qu’il employa, et en rejeta quatre qu’il fit mourir. C’est le sort ordinaire du fourbe de se perdre enfin lui-même, et de mourir sans postérité ; au lieu que l’homme droit et sincère, laisse à une nombreuse postérité l’exemple et le souvenir de sa droiture. Voilà donc le premier principe en matière de politique : se proposer le bien de l’État, le chercher par des voies droites ; principe dont il n’est jamais permis de s’éloigner, fût-ce pour devenir maître d’un empire, ou pour agrandir de beaucoup celui qu’on possède.
Outre cette première maxime, qui est la plus importante, en voici encore quelques autres, qu’un prince bon politique ne doit pas non plus négliger. Dans la plus grande prospérité être modeste, modéré, savoir céder à propos, penser aux revers qui peuvent arriver, remédier promptement aux moindres désordres qu’on aperçoit, veiller sans cesse, dans la crainte de ne pas remplir tous ses devoirs.
Du temps que Hoen kong régnait dans les États de Tsi, il y avait entre les fleuves Hiang et Hoai deux autres petits États, dont l’un se nommait Kiang, l’autre Hoang. Le roi de Tsou voisin le plus puissant, cherchait à les envahir. Ils le savaient, et cela leur donnait pour le roi de Tsou une extrême antipathie. Il arriva que Hoen kong roi de Tsi, pour soutenir la maison Tcheou, qui était presque tombée, s’unit avec divers princes. Cette ligue se traita d’abord à Yang ko, et fut enfin conclue à Koan tze, où il fut résolu d’attaquer Tsou. Les petits États Kiang et Hoang, soit par estime pour Hoen kong, soit par animosité contre Tsou, envoyèrent leurs députés, et demandèrent à entrer dans la ligue. La chose ayant été mise en délibération, Hoan tchong ministre de Hoen Kong, soutint qu’il ne fallait point les admettre. Ces deux royaumes, dit-il, sont loin de Tsi, voisins de Tsou, et tout à fait à sa bienséance. Il peut les attaquer si brusquement, qu’il ne vous sera pas possible de les sauver. Cela ne vous fera pas honneur, et Tsou d’ailleurs en deviendra plus puissant et plus à craindre. Hoen kong, malgré l’avis de son ministre, admit Kiang et Hoang. Pendant que Hoan tchong vécut, il n’en arriva point de mal ; il y pourvut avec sagesse ; mais après sa mort, Tsou envahit aussitôt Kiang et Hoang, Hoen kong ne put les sauver ; il passa, quoique sans raison, pour ne l’avoir pas bien voulu, et leur avoir manqué de fidélité. C’est ce qui diminua beaucoup la confiance qu’on avait en sa droiture, et en sa bonne politique. Les princes ligués se refroidirent : par là il devint beaucoup plus faible ; et Tsi fut bientôt hors d’état de se soutenir lui-même. Le premier principe de sa décadence fut d’avoir admis dans la ligue les deux petits États Hiang et Hoang. Hoan tchong, en bon politique, en prévoyait les fâcheuses suites. Hoen kong aurait dû l’en croire.
Du temps de l’empereur Yang vang, Tai chou son cadet se révolta. Après avoir fait beaucoup de peine à l’empereur, il se retira dans les États de