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Ces soldats sortent tous de leur corps de garde, et se mettent en rang, quand il doit passer quelque officier considérable : on y est très régulier, surtout dans le Pe tche li, qui est la province de la cour, et il y a toujours une sentinelle dans la guérite.

Dans quelques autres provinces, on voit de ces tours qui sont tombées : de temps en temps on donne ordre de les rétablir et d’y faire la garde, surtout quand on entend parler de voleurs, ou qu’il y a à craindre quelques troubles ; alors le nombre des soldats ne suffisant pas, on détermine des villages pour prêter main forte tour à tour. Les mandarins en dressent un catalogue, et c’est aux habitants de chaque village à s’accommoder entre eux, pour partager cette corvée.

Si cette loi s’observait à la rigueur, il n’y aurait jamais de voleurs ; car de demie lieue en demie lieue on trouverait des gardes, pour arrêter ceux qui seraient soupçonnés de larcin ; et cela non seulement sur le chemin des capitales, mais encore sur ceux qui conduisent de chaque ville à une autre ; et comme il y en a un grand nombre, et que toute la campagne est coupée de grands chemins, à tous moments on trouve de ces tours.

Aussi les voleurs de grand chemin sont-ils très rares à la Chine ; il s’en trouve quelquefois dans les provinces voisines de Peking, mais ils n’ôtent presque jamais la vie à ceux dont ils prennent la bourse : quand ils ont fait leur coup, il se sauvent lestement. Dans les autres provinces, on parle très peu de voleurs de grand chemin.

Ces tours ont encore un autre usage, c’est de marquer les distances d’un lieu à un autre, à peu près comme les Romains le faisaient par des pierres.


Quan kiao ou chaises à la mandarine.

Quand les chemins sont trop rudes pour aller à cheval, on se sert de chaises que les Chinois nomment quan kiao, c’est-à-dire, chaises à la mandarine, parce que les chaises dont se servent les mandarins, sont à peu près de la même forme.

Le corps de la chaise approche assez pour la figure, de celles où l’on se fait porter dans les rues de Paris, mais il est plus large, plus élevé, et plus léger. Il est construit de bambous, c’est-à-dire, d’une espèce de cannes, également fortes et légères, croisées à jour en forme de treillis, et liées fortement ensemble avec du rotin, (c’est une autre espèce de canne forte et déliée, qui croît en rampant jusqu’à huit cents ou mille pieds de longueur.)

Ce treillis est entièrement couvert, depuis le haut jusqu’en bas, d’une garniture ou ornement de toile de couleur, ou bien d’étoffe de laine, ou de soie, selon que le demande la saison, avec une seconde garniture de taffetas huilé, qu’on met par dessus en temps de pluie. Cette chaise qui a les dimensions nécessaires pour y être assis fort à l’aise, est soutenue par deux bras, semblables à ceux de nos chaises portatives ; si elle n’est portée que par deux hommes, les deux bâtons sont appuyés sur leurs épaules ; si c’est une chaise à quatre porteurs, les extrémités tant devant que derrière, sont passées dans deux nœuds coulants d’une grosse corde forte et lâche, pendue par le milieu à un gros bâton, dont les porteurs de