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tchong yen prenant la parole : Prince, dit-il, que d’honnêtes gens s’unissent et conspirent à bien faire, principalement à vous bien servir, à procurer l’avantage de l’État, il n’y a point d’inconvénient : ces liaisons n’ont rien que de fort bon et de fort utile. Un prince doit être attentif à les bien distinguer des autres qui sont criminelles et dangereuse. Ngeou yang heou instruit de ce qui se passait, présenta à l’empereur le discours qui suit.


Prince, de tout temps on a vu confondre mal à propos des liaisons également honnêtes et utiles, avec d’indignes et de dangereuses cabales. De tout temps cette confusion a été le fondement de bien des accusations injustes. Heureux les accusés qui, comme nous se sont trouvés sous un prince habile à discerner les gens d’honneur et de probité, d’avec les méchants et les âmes basses. Un prince de ce caractère aperçoit bientôt, que si les premiers s’unissent, le lien de leur union est la raison et la vertu, comme le bien public en est la fin. Il voit au contraire que cette espèce d’union, que les méchants ont entr’eux, n’est fondée que sur l’intérêt : peut-on même l’appeler union ? Car pour moi, je crois que réellement il n’y en a pas entr’eux. Chacun d’eux a quelque vue d’ambition ou de cupidité. Pendant qu’il croit se pouvoir aider des autres, il leur paraît attaché. Ces intérêts cessent-ils, en survient-il de plus grands ? On voit aussitôt ces mêmes gens se nuire, s’abandonner, se trahir mutuellement fussent-ils liés d’ailleurs par les liens les plus étroits du sang, rien ne peut les retenir. Il n’en est pas de même des gens d’honneur : ce qu’ils se proposent de garder inviolablement, ce sont les règles de la raison la plus droite, et la plus exacte équité. Ce qui fait leur occupation, c’est de donner chaque jour au prince qu’ils servent, de nouvelles preuves de leur zèle. Tout ce qu’ils craignent de perdre, c’est leur vertu et leur réputation. Voilà leurs maximes, voilà leurs exercices, voilà leurs intérêts. S’agit-il de travailler à devenir plus vertueux, et de tendre à la perfection ? Ils tiennent la même route, ils vont de compagnie, pour ainsi dire, et s’entre-aident les uns les autres. S’agit-il de servir le prince et l’État ? Ils s’y portent avec la même ardeur. Ils unissent pour cela tout ce que peut chacun d’eux, sans jamais se relâcher ou se démentir. Telle est l’union des gens d’honneur. Telles sont les liaisons qu’ils prennent ; tels sont les partis qu’ils forment. Ainsi, autant qu’il importe au prince de prévenir ou de dissiper les cabales des méchants, qui ne sont unis qu’en apparence ; autant lui est-il avantageux d’entretenir cette union sincère, que forme quelquefois entre les gens de mérite, l’amour du devoir et de la vertu.

Du temps du grand empereur Yao, les officiers de la cour se trouvèrent comme divisés en deux partis, l’un était de quatre méchants hommes, dont Hong koang était le pire. L’autre était des huit Yuen, et des huit Ki,