Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/71

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est proportionnée aux efforts d’ennemis aussi peu habiles à attaquer, qu’à se défendre.

Les forteresses, les places d’armes, les citadelles sont en grand nombre ; elles sont distinguées en sept ordres différents, que les Chinois nomment quan, guei, so, tchin, pao, pou, tchai. Il y en a environ six cents du premier ordre ; cinq cents et davantage du second ; trois cents onze du troisième ; trois cents du quatrième ; cent cinquante du cinquième ; et trois cents du dernier : ce qui fait plus de deux mille places d’armes, sans compter les tours, les châteaux, et les redoutes de la fameuse muraille, qui ont chacune leur nom, et leur garnison.

Parmi les dernières, il y a des lieux de refuge au milieu des champs, où les laboureurs et les habitants des campagnes, se retirent avec leurs troupeaux et leurs meubles, en cas de troubles, ce qui arrive rarement, ou de courses subites de voleurs. C’est là qu’ils se mettent à couvert de toute insulte. Il y en a d’autres qui sont bâties sur la cime des rochers, ou sur des montagnes escarpées, où l’on ne peut grimper que par des escaliers taillés dans le roc, ou par des échelles.

Ces places qui ne sont que des retraites de paysans, ne sont point environnées de murailles ; elles ne sont défendues que par leur situation, qui les rend inaccessibles ; ou par quelques fossés larges et profonds, capables d’arrêter des révoltes, qui ne font que passer.

On compte outre cela plus de trois mille tours ou châteaux, qu’ils appellent tai, où il y a en tout temps des sentinelles et des soldats en faction, et qui dès qu’ils découvrent quelques désordres, donnent le signal ; si c’est durant le jour, avec une bannière qu’ils arborent sur le haut de la tour ; et avec une torche allumée, si c’est pendant la nuit, afin d'avertir les garnisons voisines : cer dans tout l'empire il n'y a ni province, ni ville, ni place murée, qui n'ait des soldats pour sa défense et pour sa sûreté.

Quoique l’usage de la poudre soit ancien à la Chine, l’artillerie y est assez moderne, et l’on ne s’est guère servi de la poudre depuis son invention que pour les feux d’artifice, en quoi les Chinois excellent. Il y avait cependant trois ou quatre bombardes courtes et renforcées aux portes de Nan king, assez anciennes pour faire juger, qu’ils ont eu quelque connaissance de l’artillerie ; ils paraissaient cependant en ignorer l’usage, et elles ne servaient là, qu’à être montrées comme des pièces curieuses. Ils avaient aussi quelques pierriers sur leurs bâtiments de Marine mais ils manquaient d’adresse pour s’en servir.

Ce fut en l’année 1621 que la ville de Macao fit présent à l’empereur de trois pièces de canon avec des hommes pour les servir ; on en fit l’essai dans Peking en présence des mandarins, qui furent d’abord surpris, et ensuite consternés, quand ils virent qu’après avoir tiré une de ces pièces elle tua en reculant un Portugais et trois Chinois, qui ne se retirèrent pas assez promptement.

Ces pièces furent menées sur les frontières de l’empire du côté des Tartares, qui étant venus en troupes auprès de la grande muraille, furent