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et dit hautement que Votre Majesté ménage bien peu les épargnes de ses ancêtres, et qu’elle en verra bientôt la fin. Le peuple à la vérité n’a pas visité vos coffres : il ne peut savoir au juste ce qu’il y a, ou ce qu’il n’y a pas. Mais d’un côté il est instruit de vos libéralités, de l’autre il se voit tous les jours chargé de nouveaux impôts. De là il conclut que vos trésors ne sont pas trop bien fournis, et il soupçonne que ce que vous tirez sur lui, vous le prodiguez légèrement à des gens inutiles. Oui, ce même peuple qui voit avec joie récompenser par de grosses sommes la valeur et les services de Ouang kouei, gémit sur des gratifications bien moindres, mais trop fréquentes et mal placées. Ce ne sont point mes pensées particulières que je viens de vous exposer sur ces trois articles. Ce sont les sentiments du public. Tous les grands officiers qui vous approchent en sont aussi bien instruits que moi. La crainte de vous déplaire fait qu’ils se taisent. Leur silence fait que le gouvernement va chaque jour de mal en pis, et que le cœur de vos sujets s’aigrit à un point qui me fait tout craindre.

Ce que je souhaite donc, c’est que vous régliez incessamment l’intérieur de votre palais ; que de là vous étendiez vos soins au-dehors avec l’application que demande un si vaste empire. Alors vous ne manquerez pas de gens zélés et fidèles, qui vous aideront de leurs lumières. Les lois peu à peu se rétabliront en leur première vigueur. Vos finances mieux ménagées suffiront de reste pour les besoins de l’État, et pour assurer les frontières. Enfin, pour finir par où j’ai commencé, je supplie V. M. de faire attention, que ce qui fit périr si promptement les Tsin et les Souy, fut d’avoir fermé la porte aux avis, en les prenant mal, et qu’une conduite tout à fait contraire rendit heureux et glorieux les règnes de Ven ti et de Vou ti du temps des Han, et fit régner longtemps leur postérité.


DISCOURS DE CHE KIAI.


Sous la dynastie présente, ce ne sont qu’impôts, douanes, et défenses. Cela est excessif. Il y en a sur les montagnes et dans les vallées, sur les rivières et les mers, sur le sel et sur le fer, sur le vin et sur le thé, sur les toiles et sur les soieries, sur les passages, sur les marchés, sur les ruisseaux et sur les ponts. Sur tout cela et sur bien d’autres choses, je vois partout défenses faites, etc. Pendant qu’on veille en effet avec soin et avec rigueur à faire observer toutes ces défenses, je vois d’un autre côté le fils abandonner son père ; le peuple se soustraire à l’autorité du prince ; les hommes quitter le hoyau et la charrue ; les femmes abandonner les manufactures d’étoffes ; les gens de métier, chacun en leur genre, raffiner chaque jour en vains ornements ; les marchands commercer des perles et d’autres choses inutiles ; les gens d’étude négliger la doctrine des anciens livres, dont le sommaire est la charité et la justice ; les superstitions et les