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qu’il avait destiné à chacun deux. Il fit plus pour le vang de Tong ping qui commandait les frontières. Il accompagna son présent d’une lettre. La voici en notre langue.


Le grand officier venu de votre part, m’a instruit de tout ce qui vous regarde, je l’ai écouté moi-même immédiatement, et j’approuve fort toutes vos démarches. Tout éloigné que je suis de vous, je m’occupe souvent de vos embarras et de vos travaux ; vous ne sauriez croire avec quelle tristesse et quelle inquiétude.

Ces jours-ci, traitant les officiers de ma garde dans un appartement du midi, j’ai passé en y allant par devant la salle ou se garde ce qui a autrefois servi à Quang lie. Confucius dit : Quand nous voyons ce qui a été à l’usage d’une personne, dont la mémoire nous doit être chère, et que cette personne n’est plus, les sentiments de tendresse et de regret naissent naturellement dans notre cœur. Je l’ai éprouvé en cette occasion. Vous êtes trop bon fils[1] et trop bon ami, pour ne pas sentir la même chose en recevant ce que je vous envoie. C’est une caisse des habits qu’a laissés l’impératrice Quang lie, et un de ses ornements de tête. Cela pourra vous être de quelque consolation dans les temps que le regret de l’avoir perdue vous affligera le plus. Et vos descendants verront par là quels étaient de nos jours les habits de l’impératrice. La famille de Confucius conserve encore aujourd’hui son chariot, sa chaise, son bonnet, et ses souliers. Telle est la force de la sagesse : quand elle a été singulière, elle rend recommandable pour longtemps. Il serait naturel de vous envoyer en même temps quelque chose de Quang vou. Mais dès la seconde des années nommées Tchong yuen, ce qu’il avait laissé fut départi à tous les Ouang. J’augmente seulement mon présent d’un cheval du pays de Ouan[2]. Cet animal a cela de singulier, qu’il rend du sang par un petit trou qu’il a naturellement sur l’épaule. Une chanson faite sous Vou ti, célèbre certain cheval qu’on nommait céleste, et qui suait, dit-on, du sang. Nous avons dans celui-ci quelque chose d’approchant. Hélas ! Pendant que je vous écris ceci, peut-être actuellement courez-vous pour arrêter quelque irruption ou pour soutenir les postes que nos troupes occupent. Je pense souvent à vos alarmes, et à vos fatigues, et j’y suis tout à fait sensible. Traitez-vous bien, je vous le recommande, et ménagez votre santé[3], je souhaite fort de vous revoir bientôt.

  1. Le ouang de Tong Ping était aussi petit-files de Quing vou.
  2. Pays fameux pour les chevaux.
  3. Le chinois dit comme un homme qui a soif, en sous-entendant, souhaite boire.