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depuis du temps cette maxime est bien négligée : ce bel usage est comme aboli. N’est-ce pas une chose déplorable ?


Sur ce long discours de Kia y, l’empereur Cang hi dit : Y en habile homme visait à prévenir les moindres troubles, et sa vue était de réformer les abus, et de régler les mœurs. Dans toutes les conditions, dans tous les temps rien ne lui échappe : et comme un brillant flambeau, il porte partout sa lumière. Qu’un Koan et un Kiang aient fait éloigner un homme de ce mérite, et rendu inutile un talent si rare : quel malheur !


Autre discours du même Kia y, pour porter l’empereur Ven ti à faire des réserves en grain et en argent.


Koan tse[1] disait en parlant des peuples : on peut les instruire, et les former aux bonnes mœurs quand on a de quoi les nourrir : mais qu’un peuple à qui le nécessaire manque demeure longtemps dans le devoir sans s’échapper, depuis l’antiquité la plus reculée jusqu’à présent, on n’en a pas vu d’exemple. Un homme qui ne cultive point la terre, disait-on anciennement, est en danger de manquer de pain. Une femme qui ne travaille point aux étoffes, est en danger de manquer d’habits. Les choses nécessaires à la vie de l’homme ne croissent pas toutes en tout temps : si l’on n’a soin de les ménager, elles manqueront. Telles étaient les maximes des anciens : maximes qu’on suivait dans la pratique, et dont l’exacte observation était la base du gouvernement : aussi ne manquait-on point du nécessaire.

Aujourd’hui on néglige l’agriculture. Une infinité de gens vivent du rapport des terres, et très peu de gens les cultivent : c’est équivalemment une disette. D’un autre côté la débauche et le luxe augmentent : c’est la même chose que si des brigands en troupes ravageaient l’empire. Quand dans un État règnent en même temps la disette et le brigandage, de quoi se peut-on répondre ? Il y a quarante ans qu’a commencé la dynastie Han : il ne s’est pas fait la moindre réserve, ni particulière, ni publique. Cela fait pitié quand on y pense. La pluie vient-elle à manquer aux temps ordinaires ? Les peuples aussitôt sont dans l’alarme. Y a-t-il une année mauvaise ? Les uns trafiquent de leurs degrés, les autres vendent leurs enfants. Ce n’est point une chose inouïe. Lorsque l’État est sur le penchant de sa ruine, celui qui en est le père et le maître, peut-il n’en être pas effrayé ? Qu’il y ait des années mauvaises, c’est à quoi il faut s’attendre. Yu et Tang ont passé eux-mêmes par ces rudes épreuves. Supposons que par malheur

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