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Kou tching[1], aura dans la suite avec justice, le glorieux titre de Tai tsong[2] ; une longue postérité vous joindra toujours à votre père dans les honneurs qu’on lui rendra, tout l’empire avec elle célébrera cette piété filiale, qui vous aura fait soutenir si bien l’honneur de votre maison. On louera en même temps votre bonté, qui aura si bien pourvu aux besoins de vos sujets. On admirera surtout votre sagesse d’avoir donné au gouvernement une telle forme, que quand parmi vos successeurs, il se trouverait quelque prince, ou encore jeune, ou de peu de capacité, il ne laisserait pas de régner tranquille.

Voilà ce que je vous propose. S’il vous paraît que c’est aspirer bien haut, j’ose cependant assurer qu’avec les lumières et les qualités que vous avez, pour peu que vous vous aidiez de gens capables, vous pouvez y parvenir sans beaucoup de peine. Je vais vous en exposer les moyens avec franchise ; et ce que je souhaite le plus, c’est de voir que vous les agréez et que vous les mettez en pratique. Au reste, je n’entreprends cette exposition, qu’après un sérieux examen de l’histoire des siècles passés ; qu’après avoir appliqué avec attention ce que j’en ai pu tirer, à l’état présent des choses ; et qu’après y avoir longtemps pensé jour et nuit. Aussi ne crains-je point de dire que si Chun et Yu ressuscitaient, pour vous aider de leurs conseils, ils vous donneraient infailliblement ceux que je vais vous donner.

Dans les premiers temps d’une dynastie, si on la veut bien établir, un peu de défiance est de saison. Celui qui est au-dessus des autres, prend quelquefois de fausses alarmes, et se peut tromper dans ses soupçons. De là il arrive assez naturellement, que quelqu’un en souffre sans le mériter. Mais les choses ne peuvent guère être autrement dans les commencements d’une dynastie ; et ce n’est pas dans de telles circonstances, que la sûreté du premier maître, et le bien commun de l’État, peuvent compatir avec l’entière indemnité des puissances subordonnées, quand elles sont trop grandes. Or prenez-y garde, et faites attention que votre cadet possède un État puissant. La tentation peut lui venir, si elle ne lui est pas déjà venue, de se faire empereur d’orient, et d’aller du pair avec vous. Du côté de l’occident, le fils de feu votre frère aîné a des desseins sur Yong yang ; c’est une chose sûre : et quelques-uns même prétendent qu’ils ne tarderont guère à éclater. Pour ce qui est du Vang de Ou, vous savez quelles sont ses forces ; c’est le plus puissant des Tchu heou : ce Vang, dis-je, fait tout à sa tête dans

  1. Kou signifie antiquité. Ching signifie perfectionner.
    Ven ti, dit une glose, fit bâtir de son vivant son miao. Il y mit l’inscription Kou tching, voulant indiquer par-là qu’il était appliqué à donner la perfection à ce qu’avait établi son père.
  2. Tai signifie très grand. Tsong signifie chef de famille ; mais les deux mots joints ici ensemble sont un titre d’honneur donné plus d’une fois aux princes qu’on regardait comme cofondateurs d’une dynastie : de même qu’on a aussi donné Tai tsou, pour titre à plusieurs premiers fondateurs de dynasties. Tsou tsong, joints, signifient les ancêtres en général.