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était rien, s’ils lui trouvaient une sagesse singulière et une éminente vertu, et préféraient les sages conseils d’autrui à leurs plus naturelles inclinations. Rien de plus sage et de plus beau que le désintéressement de ces grands princes.

Aujourd’hui j’apprends que plusieurs de mes officiers font faire à l’envi des prières, pour demander du bonheur, et ce bonheur ils le demandent pour ma personne, non pour mes peuples : c’est ce que je ne puis goûter. Si j’approuvais que ces officiers peu attentifs à leurs devoirs, et peu zélés pour le bien des peuples, s’occupassent ainsi uniquement du bonheur personnel d’un prince aussi peu vertueux que je le suis, ce serait en moi un défaut de plus, et un défaut considérable. J’ordonne donc que mes officiers, sans tant s’empresser à faire pour moi ces supplications d’appareil, donnent toute l’application possible à se bien acquitter de leur emploi.

Sur cette déclaration, l’empereur Cang hi dit : C’est la vertu et non la matière, qui rend l’offrande agréable. Quand on s’applique tout de bon à la vertu, les dons de Tien[1] viennent d’eux-mêmes. Prétendre que les officiers de l’empire, en faisant réciter seulement des formules de prières, attirent du bonheur sur la personne du prince, cela se peut-il ? Ven ti certainement avait raison de blâmer un pareil abus.

Tching te sieou, fameux lettré de la dynastie Song, dit sur cette même déclaration : s’il y avait quelque chose de défectueux dans l’État, Ven ti se l’attribuait à lui seul. A l’égard du bonheur il n’en voulait point, qui ne lui fut commun avec son peuple : en cela vrai imitateur et digne successeur de nos anciens princes.





Autre déclaration du même empereur Ven ti, portant ordre qu’on lui cherche, et qu’on lui présente des gens d’un mérite et d’une droiture à l’épreuve.


Le grand Yu fit des diligences extraordinaires, pour se procurer des gens de vertu et de mérite, qui l’aidassent à bien gouverner. Les ordres qu’il donna à cet effet, non seulement furent publiés dans tout l’empire ; mais ils furent aussi connus bien loin au dehors : et l’on peut dire qu’ils ne furent ignorés que dans les pays où il ne va ni barques, ni chariots, ni hommes. Chacun de près et de loin se faisait un plaisir et un devoir de lui communiquer ses lumières. Aussi vit-on ce grand prince ne se démentir jamais, et fonder une dynastie, qui fut longtemps florissante.

Kao ti dans ces derniers temps, s’y est pris à peu près de même pour fonder la nôtre. Après avoir délivré l’empire des maux qu’il souffrait, son premier soin fut de se fournir autant qu’il put, des gens de mérite. Il mit

  1. Le Ciel.