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PARAGRAPHE II.
Exemples des anciens sur les cinq devoirs.


Le prince de Ki, qui avait le titre de tsu, c’est-à-dire, de marquis ou de baron, voyant que l’empereur Tcheou son neveu, se livrait tout entier au luxe, à la mollesse, et aux plus sales débauches, lui donna des avis sérieux sur sa conduite ; mais l’empereur, loin de déférer à ses conseils, le fit mettre en prison. On conseillait à ce prince de s’évader, et on lui en fournissait les moyens : Je n’ai garde, répondit-il, partout où j’irais, ma présence instruirait les peuples des vices et de la cruauté de mon neveu. Le parti qu’il prit, fut de contrefaire l’imbécile, et de faire des actions de démence : on ne le traita plus que comme un vil esclave, et on lui laissa la liberté de se dérober aux yeux du public.

Le prince Pi kan, qui était pareillement oncle de l’empereur, voyant que les sages conseils du prince Ki avaient été inutiles : Que deviendra le peuple, dit-il, si on laisse croupir l’empereur dans ses désordres ? Je ne puis pas me taire, et fallut-il perdre la vie, je lui représenterai le tort qu’il fait à sa réputation, et le danger où il met l’empire. Il alla aussitôt le trouver, et lui reprocha le dérèglement de sa vie. L’empereur l’écouta d’un air d’indignation mêlé de fureur. On prétend, dit-il, que le cœur des sages est différent de celui des autres hommes : je veux m’en instruire. et à l’instant il fit couper son oncle par le milieu du corps, avec ordre de bien examiner quelle était la forme de son cœur.

Cette cruelle exécution étant venue aux oreilles du prince de Ouei frère de l’empereur : Lorsqu’un fils, dit-il, a averti son père, jusqu’à trois fois, sans aucun succès, il n’en demeure pas là : mais il tâche d’attendrir son cœur par ses cris, ses larmes, et ses gémissements. Quand un ministre a donné jusqu’à trois fois des conseils salutaires à son prince, et qu’ils n’ont eu nul effet, il est censé avoir rempli tous ses devoirs, et il lui est permis de se retirer. C’est ce que je vais faire. Et en effet il s’exila lui-même de sa patrie, emportant avec lui les vases qui servent aux devoirs funèbres, afin que du moins il restât quelqu’un de la famille impériale, qui pût rendre deux fois l’année les honneurs accoutumés aux ancêtres défunts. Confucius vante fort ces trois princes, et il en parle comme de vrais héros qui ont signalé leur zèle pour la patrie.

La jeune princesse Kung kiang avait été promise en mariage au prince Kung pé ; celui-ci mourut avant que de l’avoir épousée. La princesse résolut de lui garder la fidélité promise, et de ne jamais prendre d’autre mari. Ses parents eurent beau la presser de passer à de nouvelles noces, elle ne voulut jamais y consentir ; elle composa une ode, où elle faisait serment de mourir, plutôt que de se marier.

Deux princes de deux royaumes voisins avaient quelques contestations sur une terre, dont chacun d’eux prétendait être le seigneur : ils convinrent