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qui est aisé à se tromper ; mais il lui conseille de s’assurer par lui-même de leur probité, de leur désintéressement, de leur zèle, et de leurs lumières , il lui propose le choix de ceux, qui depuis leur tendre jeunesse n’ont pas cessé de s’appliquer à l’étude de la sagesse, et qui, dans un âge mûr, ont acquis par leur travail et leur application, les connaissances nécessaires pour bien gouverner les peuples.


TROISIÈME CHAPITRE.


Ce chapitre contient le dialogue de Mencius avec son disciple Kung sung tcheou sur l’art de gouverner. Il fait voir qu’au milieu des troubles dont l’empire est agité, et vu la misère des peuples, qu’on opprime dans les divers royaumes, rien n’est plus aisé à un prince qui gouverne ses sujets avec équité et avec douceur, que de se concilier tous les cœurs, et de parvenir à la monarchie. Mais où trouver aujourd’hui, dit-il, un prince qui ait ces qualités ? Ces heureux temps, où l’empire était gouverné par de sages princes, sont passés, et à peine en reste-t-il le souvenir.

Il demande encore dans celui qui gouverne, un cœur ferme et inébranlable, soit quand il faut prendre son parti dans des affaires douteuses, soit lorsqu’il s’agit de s’exposer aux dangers. Il cite plusieurs exemples de ces grands hommes, que rien ne pouvait ébranler, et auxquels on pouvait arracher la vie, mais non pas l’intrépidité et le courage.

Il distingue deux sortes de fermeté ; celle des petits esprits, et celle des grandes âmes. Ceux-là ne suivent que la première impétuosité d’une ardeur bouillante ; celles-ci ne se dirigent que par la droite raison. Je me souviens, dit Mencius, que notre maître Confucius me donna autrefois deux règles, auxquelles je pouvais discerner la vraie grandeur d’âme et le vrai courage. Si l’occasion se présente de combattre, me disait-il et qu’après de mûres réflexions, j’aperçoive qu’il n’est pas juste d’attaquer mon ennemi, fût-il beaucoup plus faible que moi, et incapable de me tenir tête, et de balancer un moment la victoire, je me donnerai bien de garde de l’attaquer. Vous voyez bien que ce ne serait pas alors la crainte qui me ferait reculer. Mais d’un autre côté, si, après y avoir bien réfléchi, il me paraît qu’il est juste de livrer le combat ; quand on m’opposerait un million d’hommes, rien ne pourra m’arrêter, et je m’élancerai sans crainte dans les plus épais escadrons.

Mencius vient ensuite à la manière de bien gouverner. Il y a bien de la différence, dit-il, entre la conduite des anciens empereurs, et celles de nos princes : ceux-là aimaient la paix et ceux-ci aiment la guerre : ceux-là par leur piété et par l’exemple de leurs vertus, soumettaient les hommes et les cœurs : ceux-ci soumettent véritablement les hommes, mais non pas les cœurs.

Quel est le prince qui ne soit pas passionné pour la gloire, et qui n’ait pas horreur de tout ce qui peut ternir sa réputation ? Il n’y a que la vertu qui donne de la gloire ; et il n’y a que le vice qui cause du déshonneur.