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PREMIÈRE PARTIE.
PREMIER CHAPITRE.


Le premier chapitre contient un dialogue de Mencius avec le prince du royaume de Guei. Ce prince fut nommé après sa mort Hoei vang. Hoei signifie bienfaisant, et vang signifie prince, roi, c’est pourquoi on l’appelle Leang, Hoei, vang, qui veut dire le roi bienfaisant de Leang, ou de Guei. Le royaume de Guei est maintenant la province de Ho nan : et la ville de Ta Leang, qui s’appelle maintenant Cai fong en est la métropole.

Le prince de Leang avait invité les sages de l’empire à venir dans son royaume : Mencius s’y rendit. La première instruction qu’il donna au prince, fut de n’avoir en vue dans l’administration de son État, que la piété et l’équité : Un prince, lui dit-il, est le modèle de ses sujets : s’il ne recherche que ses avantages particuliers, ses ministres à son exemple, les mandarins, les lettrés, le peuple même, n’envisageront que leurs propres intérêts ; c’est ce qui ne se peut faire qu’aux dépens du bien public qui sera négligé : et alors le royaume se trouvera sur le penchant de sa ruine.

Mencius rendit une seconde visite au prince, lorsqu’il se promenait dans son parc, et qu’il se divertissait à voir nager des cygnes dans son étang, et à voir courir les cerfs dans sa forêt. Un roi, dit le prince, qui ne doit s’occuper que du gouvernement de ses peuples, peut-il s’arrêter à ces sortes d’amusements ?

Les princes, comme les autres hommes, répondit Mencius, peuvent prendre des divertissements honnêtes : on lit dans le Chi king que le sage empereur Ven vang ayant dressé le plan d’une tour pour observer les astres, d’un parc, et d’un étang, le peuple accourut à l’envi pour travailler à ces ouvrages, et s’y employa avec tant de zèle et d’ardeur qu’ils furent achevés en très peu de jours.

Ce bon prince se plaisait de temps en temps à se promener dans ses allées à voir courir ses cerfs apprivoisés, à considérer ses poissons dans l’eau, et à voir voler ses cigognes. D’où venait dans ce peuple tant de zèle à procurer des plaisirs à son prince ? C’est qu’il en était gouverné avec piété et avec équité : c’est que ce sage empereur était très attentif à ne point laisser manquer son peuple des choses nécessaires à la vie.

Au contraire l’empereur Kié, qui avait coutume de dire qu’il était dans l’empire ce que le soleil est dans le Ciel, et qu’il ne périrait qu’avec cet astre, ne goûtait aucun plaisir au milieu de ses délices, et vivait dans une inquiétude continuelle, parce qu’il était devenu pour son peuple un objet d’exécration et d’horreur.