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engagé, est rempli de dangers : mais la voie de Ven vang est droite et facile. Postérité d’un si sage roi, conservez chèrement le bonheur qu’il vous a procuré.


TROISIÈME ODE
A la louange du même.


Celui qui seul est roi et suprême seigneur, abaisse sa majesté jusqu’à prendre soin des choses d’ici-bas. Toujours attentif au vrai bonheur du monde il promène ses regards sur la face de la terre. Il voit deux peuples qui ont abandonné ses lois, et le Très Haut ne les abandonne pas encore : il les examine, il les attend ; il cherche partout un homme selon son cœur, et il veut étendre lui-même son empire. Dans ce dessein, il arrête avec amour ses yeux vers l’occident. C’est là qu’il doit habiter, et régner avec ce nouveau roi.

Il commence[1] donc par en ôter toutes les mauvaises herbes, et il nourrit avec soin les bonnes : il émonde ce que les arbres ont de trop, et il met entre eux un bel ordre : il arrache les roseaux, et il cultive les mûriers. Le Seigneur va rendre aux hommes leur première vertu ; tous leurs ennemis s’enfuiront devant eux : le Ciel veut se donner un égal[2]. Jamais volonté ne fut plus absolue.

Le Seigneur regarde cette sainte montagne : c’est un séjour de paix ; aussi n’y croît-il aucun des bois dont on fait les armes. C’est un règne éternel ; aussi n’y voit-on que des arbres dont les feuilles ne tombent point. C’est l’ouvrage du Très Haut ; il a mis le cadet à la place de l’aîné ; il n’y a que Ven vang, dont le cœur sache aimer ses frères : il fait tout leur bonheur et toute leur gloire ; le Seigneur l’a comblé de ses biens, et lui a donné tout l’univers pour récompense.

Le Seigneur pénètre dans le cœur de Ven vang[3] et il y trouve une vertu secrète et inexplicable, dont l’odeur se répand partout. C’est un merveilleux assemblage de ses dons les plus précieux : l'intelligence pour régler tout ; la sagesse pour éclairer tout ; la science, pour enseigner ; le conseil, pour gouverner ; la piété et la douceur, pour se faire aimer ; la force et la majesté, pour se faire craindre ; une grâce enfin et un charme qui lui attire tous les cœurs : vertus toujours les mêmes, et incapables de changer. C’est

  1. Tout ceci doit s’entendre allégoriquement, selon le style de la poésie antique. Le Chi king est plein d’endroits semblables.
  2. Le caractère poei veut dire, compagnon, égal. On le prend quelquefois pour époux et épouse. Les interprètes ont cru qu’on parlait ici de l’épouse que le Ciel destinait à Ven vang, et que le Chi king appelle ailleurs Tien poei, sœur du Ciel.
  3. On lit dans le texte vang ti ; mais les meilleurs interprètes conviennent que c’est une faute, et qu’il faut lire Ven vang, parce que tout ce qu’on dit en cet endroit, ne peut convenir à un autre qu’à Ven vang.