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du premier mois[1]. Ces grandes vacances sont immédiatement précédées du grand examen des écoliers. Outre les grandes vacances, il y en a, mais peu dans le cours de l’année, aux fêtes, ou aux réjouissances chinoises en différents mois. Le jour de la naissance du sien feng, ou professeur, est encore une fête pour les écoliers, qui doivent ce jour-là lui faire leurs présents de conjouissance. La classe du soir finit tous les jours par une courte histoire ; cette pratique est fort recommandée. Enfin, avant que d’envoyer les écoliers, on expose une petite planche vernissée, sur laquelle sont quatre petits vers, qui renferment une instruction d’usage dans le commerce de la vie. Chacun transcrit ces vers, et tous les lisent à haute voix jusqu’à trois fois. Ainsi se termine l’école de chaque jour.

Tchu hi a un chapitre entier, où il montre avec quel soin les jeunes étudiants doivent éviter, 1° Le trop de liaisons, 2° Le jeu, 3° Le vin, 4° La galanterie, 5° Enfin une vie molle et oisive.

Il passe ensuite à plusieurs co si, c’est à-dire, à plusieurs sujets de gémir sur la négligence qu’on apporte à l’étude.

1° L’histoire nous apprend qu’autrefois la passion pour l’étude était si grande, qu’un pauvre homme réduit à fouir la terre pour vivre, portait son livre, afin d’étudier par intervalle, et au milieu d’un si rude travail. Quel sujet de honte pour ceux, qui étant à leur aise, et ayant la commodité d’étudier, vivent sans ardeur pour l’étude !

2° Autrefois il fallait aller bien loin chercher un maître, et l’on ne plaignait point ses pas : aujourd’hui on a des maîtres à sa porte, et l’on néglige d’en profiter.

3° Autrefois il fallait transcrire les livres pour s’en fournir ; quel travail ! On le dévorait pourtant ce travail. Aujourd’hui qu’on a trouvé le bel art de l’imprimerie, que les boutiques et les bibliothèques regorgent de livres, on néglige de s’en servir.

4° Faute d’interprètes, il fallait autrefois passer trois ans à lire, et à entendre un seul de nos livres ; trente ans se passaient à apprendre les seuls livres canoniques : aujourd’hui avec le secours et les lumières de tant de savants, on peut à la fleur de l’âge acquérir toutes ces connaissances et l’on passe les beaux jours dans l’indolence et l’oisiveté !

5° Combien de malheureux naissent sourds et aveugles ! On plaint leur disgrâce, et l’on a raison ; et de jeunes gens, qui ont avec le libre usage des sens un esprit vif et pénétrant, abusent de ces précieux dons, en négligeant de s’instruire dans les livres : s’ils étaient sans yeux, et sans oreilles, que leur arriverait-il de pis ?

6° Dans la vie, quel est l’âge et l’état qui n’ait ses peines ? Et un jeune homme, qui se voit exempt de tout soin, et de tout embarras, fuit une peine légère, telle que celle de lire des livres ; tandis peut-être que son père,

  1. Le commencement de l'an est le temps de grandes réjouissances qui finissent quelques jours après la fête des Lanternes, laquelle se célèbre surtout le quinzième de la première lune.