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et une fois en hiver, et c’est une chose générale par tout l’empire. Je dis au moins, parce qu’outre ces deux examens généraux, les mandarins des lettrés les font venir assez souvent pour examiner le progrès qu’ils font dans leurs études et les tenir en haleine. Il y a même des gouverneurs de ville qui se donnent ce soin, et qui font venir chaque mois à leur tribunal les lettrés qui n’en sont pas éloignés, pour les faire composer, et pour récompenser ceux qui ont le mieux réussi, les traitant même ce jour-là à leurs frais.

Il n’est pas surprenant qu’on se donne tant de peine à élever les jeunes gens dans un État, ou l’on fait profession des lettres depuis tant de siècles, et où on les préfère à tous les avantages de la nature ; il n’y a ni ville ni bourg, ni presque aucun petit village, où il n’y ait des maîtres qui tiennent école, pour y instruire la jeunesse dans les sciences : les parents qui sont plus à leur aise, donnent à leurs enfants des précepteurs, qui les enseignent, qui les accompagnent, qui forment leurs mœurs, qui leur apprennent les cérémonies, les révérences, les compliments, les civilités ordinaires, les visites, et selon leur âge, l’histoire et les lois. On trouve une infinité de ces précepteurs, parce que parmi ceux qui aspirent en grand nombre aux degrés il y en a très peu qui y parviennent.

Dans les maisons de qualité, ceux à qui on confie cet emploi, ont souvent le degré de docteur, ou du moins celui de licencié. Dans les maisons ordinaires, on prend des bacheliers, qui ne laissent pas de continuer le cours de leurs études, et d’aller aux examens, pour parvenir au degré de docteur. Au reste, l’emploi des maîtres d’école est honorable ; les parents des enfants les nourrissent, leur font des présents, les traitent avec beaucoup d’honneur, leur donnent partout le premier pas : sien seng notre maître, notre docteur, est le nom qu’on leur donne, et leurs disciples conservent toute leur vie pour eux les plus grands égards.


Ce qui supplée aux universités.

Quoiqu’il n’y ait point à la Chine d’université, comme en Europe, il n’y a point de ville du premier ordre, qui n’ait un grand palais destiné aux examens des gradués, et dans les capitales il est beaucoup plus vaste. C’est ainsi qu’un missionnaire décrit l’édifice de la ville où il était, et autant que le lieu le comporte, ils sont presque tous semblables. Il est fermé, dit-il, de hautes murailles, la porte en est magnifique ; et au devant se voit une grande place large de cent cinquante pas, et garnie d’arbres, avec des bancs et des sièges pour les capitaines et les soldats, qui sont en sentinelle dans le temps des examens.

On entre d’abord dans une grande tour, où se placent des mandarins avec un corps de garde, au bout de laquelle est une autre muraille, avec une porte à deux battants. Dès qu’on y est entré, on trouve un fossé plein d’eau, qu’on passe sur un pont de pierre, pour se rendre à une troisième porte où sont des gardes, qui ne laissent entrer personne sans un ordre exprès des officiers.

De là on découvre une grande place, où l’on n’entre que par un chemin très étroit. Des deux côtés de cette place, sont tout de suite une infinité