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Au regard des aliments, les feuilles chargées de rosée, celles qui ont été séchées au soleil, ou à un grand vent, ou bien qui sont empreintes de quelque mauvaise odeur, sont la cause la plus ordinaire de leurs maladies. Il est à propos de cueillir les feuilles deux ou trois jours d’avance, et de les tenir au large dans un lieu bien net et bien aéré ; sans oublier de ne donner dans les premiers jours que des feuilles tendres et coupées en petits filaments.

Au bout de trois ou quatre jours, quand ils commencent à devenir blancs, on doit augmenter la nourriture et la donner moins fine. Ils tirent ensuite un peu sur le noir, il faut alors leur donner des feuilles en plus grande quantité, et telles qu’on les a cueillies. Ils redeviennent blancs, et mangent avec moins d’avidité, diminuez un peu les mets ; ils jaunissent, diminuez les davantage ; ils deviennent tout à fait jaunes, et sont, selon le langage chinois, à la veille d’un des trois sommeils, c’est-à-dire, qu’ils sont prêts à muer, retranchez tout repas. Toutes les fois qu’ils muent, il faut les traiter de même à proportion de leur grandeur.

Entrons dans un plus grand détail : ces vers mangent également le jour et la nuit : dès qu’ils sont éclos, il leur faut quarante-huit repas par jour, deux par heure. Le second jour on leur donne trente fois des feuilles, mais qui sont coupées moins menues. On leur en distribue encore moins le troisième jour. Ces petits insectes ressemblent alors aux enfants nouvellement nés, qui veulent toujours être à la mamelle, sans quoi ils languissent. Si la nourriture n’était pas proportionnée à leur appétit, il leur viendrait des échauffaisons qui ruineraient les plus belles espérances. On conseille dans ces premiers jours de leur donner des feuilles, que des personnes saines aient conservées quelque temps dans leur sein. Les petits vers s’accommodent fort de la transpiration du corps humain.

Aux temps des repas, il faut répandre également partout les mets qu’on leur donne. Un ciel sombre et pluvieux affaiblit d’ordinaire leur appétit : le remède est d’allumer immédiatement avant le repas, un brandon de paille bien sèche, et dont la flamme soit égale, et de le passer par dessus les vers, pour les délivrer du froid et de l’humidité qui les engourdit. Ce petit secours les met en appétit et prévient les maladies. Le grand jour y contribue pareillement, aussi lève-t-on pour lors les paillassons des fenêtres.

Mais à quoi bon se donner tant de soins, pour faire manger souvent ce petit troupeau ? C’est afin de hâter sa vieillesse, et de le mettre plutôt en état de travailler aux coques : c’est en ces soins que consiste le grand profit qu’on en espère. S’ils vieillissent dans l’espace de 23 ou de 25 jours, une claie couverte de vers, dont le poids, lorsqu’on les a pesés d’abord, aura été d’un mas, c’est-à-dire, d’un peu plus d’une dragme, produira 25 onces de soie au lieu que si faute de soins et de nourriture, ils ne vieillissent que dans 28 jours, on n’aura que 20 onces de soie, et s’ils ne vieillissent que dans un mois ou 40 jours, on n’en retirera qu’environ dix onces.

Quand ils approchent de la vieillesse, donnez-leur une nourriture facile,