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le haut d’une aiguille de tête, et l’y enchâsseront en forme de pierrerie. Cette espèce de mail se détache à la longue mais on tâche d’obvier à cet inconvénient, en le mettant sur une légère couche de colle de poisson, ou de vache.

Le tsiu, de même que les autres couleurs dont je viens de parler, ne s’emploie que sur la porcelaine qu’on recuit. Telle est la préparation du tsiu : on ne le rôtit point comme l’azur ; mais on le brise, et on le réduit en une poudre très fine ; on le jette dans un vase plein d’eau, on l’y agite un peu, ensuite on jette cette eau où il se trouve quelques saletés, et l’on garde le cristal qui est tombé au fond du vase. Cette masse ainsi délayée perd sa belle couleur, et paraît au dehors un peu cendrée. Mais le tsiu recouvre sa couleur violette, dès que la porcelaine est cuite. On conserve le tsiu aussi longtemps qu’on le souhaite. Quand on veut peindre en cette couleur quelques vases de porcelaine, il suffit de la délayer avec de l’eau, en y mêlant, si l’on veut, un peu de colle de vache, ce que quelques-uns ne jugent pas nécessaire. C’est de quoi l’on peut s’instruire par l’essai.

Pour dorer, ou argenter la porcelaine, on met deux fuen de céruse sur deux mas de feuilles d’or ou d’argent, qu’on a eu soin de dissoudre. L’argent sur le vernis tsi kin a beaucoup d’éclat. Si l’on peint les unes en or, et les autres en argent, les pièces argentées ne doivent pas demeurer dans le petit fourneau autant de temps que les pièces dorées ; autrement l’argent disparaîtrait, avant que l’or eût pu atteindre le degré de cuite qui lui donne son éclat.


De la porcelaine colorée.

Il y a ici une espèce de porcelaine colorée, qui se vend à meilleur compte, que celle qui est peinte avec les couleurs dont je viens de parler. Peut-être que les connaissances que j’en vais donner, seront de quelque utilité en Europe, par rapport à la faïence, supposé qu’on ne puisse pas atteindre à la perfection de la porcelaine de la Chine.

Pour faire ces sortes d’ouvrages, il n’est pas nécessaire que la matière qui doit y être employée, soit si fine : on prend des tasses qui ont déjà été cuites dans le grand fourneau, sans qu’elles y aient été vernissées, et par conséquent qui sont toutes blanches, et qui n’ont aucun lustre : on les colore en les plongeant dans le vase où est la couleur préparée, quand on veut qu’elles soient d’une même couleur : mais si on les souhaite de différentes couleurs, tels que sont les ouvrages appelés hoang lou ouan qui sont partagés en espèces de panneaux, dont l’un est vert, l’autre jaune, etc. on applique ces couleurs avec un gros pinceau. C’est toute la façon qu’on donne à cette porcelaine, si ce n’est qu’après la cuite, on met en certains endroits un peu de vermillon, comme, par exemple, sur le bec de certains animaux ; mais cette couleur ne se cuit pas, parce qu’elle disparaîtrait au feu ; aussi est-elle de peu de durée.

Quand on applique les autres couleurs, on recuit la porcelaine dans le grand fourneau, avec d’autres porcelaines qui n’ont pas encore été cuites ; il faut avoir soin de la placer au fond du fourneau, et au-dessous du soupirail, où le feu a moins d’activité, parce qu’un grand feu anéantirait les couleurs.