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qu’au travers on voit toutes les veines du bois. Si l’on veut cacher toute la matière sur laquelle on travaille, on multiplie le nombre des couches de vernis, et il devient alors si éclatant, qu’il ressemble à une glace de miroir. Quand l’ouvrage est sec on y peint en or ou en argent diverses sortes de figures, comme des fleurs, des hommes, des oiseaux, des arbres, des montagnes, des palais, etc. sur lesquels on passe encore une légère couche de vernis, qui leur donne de l’éclat et qui les conserve.

L’autre manière qui est moins simple, demande plus de préparation, car elle se fait sur une espèce de petit mastic, qu’on a auparavant appliqué sur le bois. On compose de papier, de filasse, de chaux, et de quelques autres matières bien battues, une espèce de carton qu’on colle sur le bois, et qui forme un fond très uni et très solide, sur lequel on passe deux ou trois fois de l’huile dont j’ai parlé, après quoi l’on applique le vernis à différentes couches, qu’on laisse sécher l’une après l’autre. Chaque ouvrier à son secret particulier, qui rend l’ouvrage plus ou moins parfait, selon qu’il est plus ou moins habile.

Il arrive souvent qu’à force de répandre du thé ou des liqueurs chaudes sur des ustensiles de vernis, le lustre s’en efface, parce que le vernis se ternit et devient jaune. Le moyen, dit un auteur chinois, de lui rendre le noir éclatant qu’il avait, c’est de l’exposer une nuit à la gelée blanche, et encore mieux, de le tenir quelque temps dans la neige.





De la porcelaine.


La porcelaine qui est un des meubles les plus ordinaires des Chinois et qui fait l’ornement de leurs maisons, a été si recherchée en Europe, et il s’y en fait encore un si grand commerce, qu’il est à propos de faire connaître la manière dont elle se travaille. Quelques auteurs ont écrit qu’elle se faisait de coques d’œufs, ou de coquilles de certains poissons enfouies en terre durant vingt, trente de même cent ans : c’est une pure imagination d’écrivains, qui ont hasardé sur cela leurs conjectures, comme ils ont fait sur beaucoup de choses qui concernent ce vaste empire, dont en divers temps ils ont donné les idées les plus fausses, et souvent les plus ridicules.


Du lieu où elle se fabrique.

On ne travaille à la porcelaine que dans une seule bourgade de la province de Kiang si. Cette bourgade nommée King te tching qui a une lieue de longueur, et plus d’un million d’âmes, n’est éloignée que d’une lieue de Feou leang, ville du troisième ordre dont elle dépend. Feou leang est de la dépendance de Iao tcheou, l’une des villes du premier ordre de la province. Le père Dentrecolles avait une église dans King te tching, et parmi ses chrétiens il en comptait plusieurs qui travaillaient à la porcelaine, ou qui en faisaient un grand commerce : c’est d’eux qu’il a tiré des connaissances exactes de toutes les parties de ce bel art.