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Ils vont à Camboye ou à Siam, où ils portent des marchandises propres de ces pays-là, et en prennent d’autres qui sont d’un grand débit au Japon. Quand ils sont de retour en leur pays, ils trouvent qu’ils ont fait un profit de deux cents pour cent.

Si des ports de la Chine, c’est-à-dire, de Canton, d’Emouy, ou de Ning po ils vont en droiture au Japon, voici les marchandises qu’ils y portent : 1° des drogues, comme ginseng, aristoloche, rhubarbe, esquine, mirabolans, et autres drogues semblables. 2° De l’écorce d’arecque, du sucre blanc, des cuirs de buffle et de bœuf : ils gagnent beaucoup sur le sucre, le gain va quelquefois à mille pour cent. 3° Toutes sortes de pièces de soie, et principalement des satins, des taffetas, et des damas de diverses couleurs, mais surtout de couleur noire. Il y a de ces pièces qui ne leur ont coûté que six taels à la Chine, et qu’ils vendent au Japon jusqu’à 15 taels. 4° Des cordes de soie pour les instruments, du bois d’aigle et de sandal qui est très recherché des Japonais pour les parfums, parce que sans cesse ils parfument leurs idoles. 5° Enfin des draps d’Europe, et des camelots dont l’on a un prompt débit ; mais comme les Hollandais y en portent, les Chinois ne s’en chargent guère, à moins qu’ils ne puissent les vendre au même prix, et ils assurent qu’ils y gagnent cinquante pour cent, ce qui fait voir combien le profit des Hollandais doit être considérable.

Les marchandises que les négociants chinois chargent sur leurs vaisseaux pour le retour, sont,

1° Des perles fines qui leur coûtent plus ou moins, à proportion de leur beauté, et de leur grosseur : il y a des occasions, où ils gagnent mille pour cent.

2° Le cuivre rouge en barre, qu’ils achètent depuis trois jusqu’à quatre taels de demi, et qu’ils vendent à la Chine dix de douze taels ; du cuivre en œuvre, comme balances, réchaud, cassolettes, bassins, etc. qu’ils revendent bien cher dans leur pays : ce cuivre est beau, et agréable à la vue.

3° Des lames de sabre qui sont fort estimées des Chinois : elles ne s’achètent qu’une piastre au Japon, et se vendent quelquefois jusqu’à dix piastres à la Chine.

4° Du papier à fleurs et uni, dont les Chinois font des éventails.

5° Des porcelaines qui sont très belles, mais qui ne sont pas du même usage que celles de la Chine, parce qu’elles souffrent difficilement l’eau bouillante. Elles se vendent au Japon au même prix à peu près, qu’on vend à Canton celles de la Chine.

6° Des ouvrages de vernis. Il ne s’en fait point de pareils au reste du monde. Le prix n’en est pas réglé, mais les Chinois ne s’en chargent guère, dans la crainte où ils sont de ne pouvoir s’en défaire ; et quand ils en apportent, ils le vendent extrêmement cher. Un cabinet qui n’avait que deux pieds de hauteur, et un peu plus de largeur, a été vendu à la Chine jusqu’à cent piastres. Les marchands d’Emouy et de Ning po, sont ceux qui s’en chargent le plus volontiers, parce qu’ils les portent à Manille, et à Batavia, et qu’ils y gagnent considérablement avec les Européens, qui sont avides de ces sortes d’ouvrages.