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leur dîner. Si quelque serpent s’approche d’eux, il est tout d’un coup assoupi par l’odeur du musc, et il ne va pas plus loin.

Ce qui se passa quand je fus de retour à Peking, confirme en quelque sorte ce que j’ai dit, que la chair de serpent est la principale nourriture de l’animal musqué. On servit à souper une partie du chevreuil : un de ceux qui étaient à table, a une horreur extrême du serpent. Cette horreur est si grande, qu’on ne peut même en prononcer le nom en sa présence, qu’il ne lui prenne aussitôt de violentes nausées. Il ne savait rien de ce qui se dit de cet animal et du serpent, et je me donnai bien de garde de lui en parler, mais j’étais fort attentif à sa contenance. Il prit du chevreuil comme les autres, avec intention d’en manger ; mais à peine en eût-il porté un morceau à la bouche, qu’il sentit un soulèvement de cœur extraordinaire, et qu’il refusa d’y toucher davantage. Les autres en mangeaient volontiers, et il fut le seul qui témoigna de la répugnance pour cette sorte de mets.





Des lacs, des canaux, et des rivières dont l’empire de la Chine est arrosé, des barques, des vaisseaux, ou sommes chinoises.


Si la Chine jouit d’une si heureuse abondance, elle en est redevable non seulement à la profondeur et à la bonté de ses terres, mais encore plus à la quantité des rivières, des lacs, et des canaux dont elle est arrosée. Il n’y a point de ville, ni même de bourgade, surtout dans les provinces méridionales, qui ne soit sur les bords ou d’une rivière, ou d’un lac, ou de quelque canal. J’ai eu occasion d’en parler assez au long dans plusieurs endroits de cet ouvrage[1] ; ainsi pour ne point tomber dans des redites, je me bornerai à en rappeler simplement le souvenir.


Des lacs en Chine.

Parmi les lacs qu’on voit dans la plupart de ses provinces, les plus célèbres sont celui de Tong ting hou dans la province de Hou quang, qui a 80 lieues et davantage de circuit ; celui de Hong se hou, qui est partie dans la province de Kiang nan, et partie dans celle de Tche kiang, et enfin celui de Po yang hou, dans la province de Kiang si qu’on appelle autrement le lac de Iao tcheou. Ce dernier a trente lieues de circuit, et est formé par le confluent de quatre rivières aussi grandes que la Loire, qui sortent de la province de Kiang si. On y essuie des typhons, comme sur les mers de la Chine, c’est-à-dire, qu’en moins d’un quart d’heure, le vent tourne aux quatre côtés opposés, et submerge quelquefois les meilleures barques.

Quand on approche de l’endroit le plus périlleux du lac, on voit un temple placé sur un rocher escarpé. Les matelots chinois battent alors d’une espèce

  1. Tome I. oage 41.