Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/172

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rangées sur deux lignes vis-à-vis les unes des autres, de telle sorte que les tables d’en haut et des principaux conviés, étaient un peu avancées sur le devant, ; et celles d’en bas un peu retirées en arrière.

Toutes les tables d’en haut étaient ornées par devant d’un parement de satin violet, relevé d’un dragon à quatre ongles en broderie d’or ; et les fauteuils, dont les bras et le dossier formaient un demi cercle obliquement incliné, étaient couverts d’une garniture semblable. La garniture des tables et des chaises d’en bas n’étaient différentes de celles d’en haut, que par la figure de la broderie, qui était une espèce de cigogne.


Divisions de ce festin.

Comme ce festin fut interrompu et divisé, pour ainsi dire, en deux repas, que celui du matin se fit plus cavalièrement, et que celui du soir fut accompagné de toutes les cérémonies chinoises ; pour donner une juste idée de ces cérémonies, je ne parlerai que de celui du soir.

Lorsque les conviés allèrent pour se mettre à table sur le soir ils trouvèrent toutes les tables doublées, c’est-à-dire, qu’au devant de chaque table du matin, il y en avait une seconde, chargée d’un banquet de parade, qui consistait en seize pyramides de viandes, d’autres sortes de mets, de fruits, etc ; chaque pyramide était haute d’un pied et demi, et toutes étaient peintes et ornées de fleurs.

J’ai dit d’un banquet de parade, parce que ces sortes de tables n’étant dressées que pour la montre, et pour régaler les yeux des conviés ; à peine sont-ils assis, qu’on les retire toutes, et on les distribue à la fin du repas aux domestiques des conviés, ou plutôt à leurs porteurs de chaise, et aux petits valets du tribunal.

L’autre table portait sur son bord antérieur un petit piédestal, sur lequel étaient une petite cassolette de cuivre, une boîte de parfums, une fiole d’eau odoriférante, avec un tube ou cornet façon d’agate, qui contenait les petits instruments propres à mettre les parfums dans la cassolette, et à remuer la cendre.

Sur les deux coins antérieurs de la table, étaient dressées deux petites planches vernissées, qu’ils nomment ouei, ornées d’un emblème d’un côté, et de l’autre de quelques petites pièces de poésies.

Les deux autres coins de la table étaient garnis chacun de trois petites assiettes de porcelaine qui contenaient chacune de petites herbes et des légumes confits au sel et au vinaigre, pour exciter l’appétit : entre deux, il y avait une petite tasse d’argent avec sa soucoupe.

Ces sortes de festins sont ordinairement accompagnés de la comédie. Au commencement du repas, les comédiens déjà revêtus de leurs habits, se disposaient à jouer leur personnage. Le chef de la troupe s’étant avancé au haut de la salle, me vint présenter le livre qui contenait la liste de toutes ses comédies, et me pria de marquer celle que je voulais qu’ils jouassent, car ils en savent ordinairement cinquante ou soixante par cœur, qu’ils sont également prêts de représenter, selon le choix des conviés.