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cette table couronnée, et marchèrent. Tous les princes du sang, les autres princes, et les seigneurs de la première noblesse, avaient déjà précédé selon leur rang, et attendaient près d’une des portes intérieures du palais.

Les autres grands officiers, comme les premiers ministres de l’empire, les docteurs du premier ordre, les présidents des Cours souveraines, et les autres mandarins tartares et chinois, soit de lettres, soit de guerre, tous revêtus des plus beaux habits de cérémonie, chacun selon leur degré, suivaient à pied la même table. Plusieurs instruments de musique formaient un concert très agréable, surtout aux oreilles chinoises. Les tambours et les trompettes se faisaient aussi entendre en différents endroits du palais. On commença la marche, et lorsqu’on fut près de la porte appelée Ou men, les princes se joignirent aux autres qui accompagnaient le compliment, et se mirent à leur tête. Alors ils marchèrent tous ensemble jusqu’à la grande salle d’audience[1].

Lorsqu’ils furent entrés dans cette salle, on tira de dessus la table portative, le compliment relié en forme de petit livre, et on le plaça sur une autre table, préparée exprès au milieu de la grande salle d’audience.

Tous s’étant rangés dans un bel ordre, firent les révérences ordinaires devant le trône impérial, comme si Sa Majesté y eût été placée : c’est-à-dire, que tous étant debout, chacun à la place qu’il doit occuper selon son rang et sa charge, ils se mirent à genoux, frappèrent trois fois du front contre terre avec un grand respect, et se relevèrent. Ensuite ils se mirent à genoux, et frappèrent encore trois fois du front contre terre, et se relevèrent : enfin ils se mirent une troisième fois à genoux avec la même cérémonie.

Alors chacun se tenant à la même place dans un grand silence, les instruments de musique recommencèrent à jouer, et les présidents du tribunal des rits, avertirent le premier eunuque de la présence, que tous les Grands de l’empire suppliaient Sa Majesté de venir s’asseoir sur son précieux trône.

Ces paroles ayant été portées à l’empereur, il parut, et monta sur son trône. Aussitôt deux docteurs du premier ordre qui avaient été nommés, s’avancèrent près de la table, firent quelques révérences à genoux, et se relevèrent. Un d’eux ayant pris le petit livre, lut d’une voix haute et distincte, le compliment que cette auguste compagnie faisait à Sa Majesté. La lecture du compliment qui ne doit pas être fort long, étant achevée, et les docteurs s’étant retirés à leur place, l’empereur descendit de son trône, et rentra dans l’intérieur de son palais.

L’après-midi les princesses du sang, les autres princesses, et les dames de la première qualité, se rendirent au palais avec les femmes de tous les grands mandarins, dont je viens de parler ; chacune en son rang et selon sa dignité, s’avança vers le palais de l’impératrice : elles furent conduites par

  1. C’est la salle dans laquelle l’empereur admet les ambassadeurs, où il fait les instructions publiques deux ou trois fois l’année, et où il reçoit le premier jour de l’an chinois, les respects de tous les officiers qui sont à Peking.