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L’empereur sacrifia, et après le sacrifice, il descendit avec les trois princes et les neuf présidents qui devaient labourer avec lui. Plusieurs grands seigneurs portaient les coffres précieux, qui renfermaient les grains qu’on devait semer. Toute la cour y assista en grand silence : l’empereur prit la charrue, et fit en labourant plusieurs allées et venues : lorsqu’il quitta la charrue, un prince du sang la conduisit et laboura à son tour ; ainsi du reste. Après avoir labouré en divers endroits, l’empereur sema les différents grains : on ne laboure pas alors tout le champ entier, mais les jours suivants les laboureurs de profession achèvent de le labourer. Il y avait cette année là 44 anciens laboureurs, et 42 plus jeunes. La cérémonie se termina par une récompense que l’empereur leur fit donner : elle est réglée, et elle consiste en quatre pièces de coton teintes en couleur, qu’on donne à chacun d’eux, pour se faire des habits. Le gouverneur de la ville de Peking, va souvent visiter ce champ qu’on cultive avec grand soin : il parcourt les sillons, il examine s’il n’y a point d’épis extraordinaires et de bon augure. Par exemple, il avertit dans cette occasion qu’il y avait tel tuyau, qui portait jusqu’à treize épis.

Dans l’automne, c’est ce même gouverneur qui doit faire amasser les grains : on les met dans des sacs de couleur jaune, qui est la couleur impériale, et ces sacs se gardent dans un magasin construit exprès, qui s’appelle le magasin impérial. Ces grains se réservent pour les cérémonies les plus solennelles : lorsque l’empereur sacrifie au Tien ou au Chang ti, il en offre comme étant le fruit de ses mains ; et à certains jours de l’année, il en sert à ses ancêtres comme il leur en servirait, s’ils étaient encore vivants.


Récompenses pour les laboureurs.

Parmi plusieurs beaux règlements, que le même empereur a fait depuis son avènement à la couronne, pour le gouvernement de son empire, il a eu une attention singulière pour les laboureurs : afin de les exciter au travail, il a ordonné aux gouverneurs de toutes les villes, de l’informer chaque année de celui, qui parmi les gens de cette profession, se sera le plus distingué dans leur district, par son application à la culture des terres, par l’intégrité de sa réputation, par le soin d’entretenir l’union dans sa famille, et la paix avec ses voisins ; enfin par son économie, et son éloignement de toute dépense inutile.

Sur le rapport du gouverneur, Sa Majesté élèvera ce sage et actif laboureur, au degré de mandarin du huitième ordre, et lui envoiera des patentes de mandarin honoraire. Cette distinction lui donnera droit de porter l’habit de mandarin, de visiter le gouverneur de la ville, de s’asseoir en sa présence, et de prendre du thé avec lui : il sera respecté le reste de ses jours, et après sa mort, on lui fera des obsèques convenables à son degré, et son titre d’honneur sera écrit dans la salle des ancêtres. Quelle joie pour ce vénérable vieillard et pour toute sa famille ! outre l’émulation qu’une telle récompense excite parmi les laboureurs, l’empereur donne encore un nouveau lustre à une profession si importante à l’État, et qui de tout temps a été estimée dans l’empire.